Le recueil des « rêves critiques » faits et transcrits par le critique d’art et commissaire d’exposition Jean-Max Colard entre 2005 et 2013, versant nocturne de son activité régulière d’écriture sur l’art, qui constitue comme une collection particulière d’œuvres imaginaires, d’expositions mentales, de moments intérieurs passés ou revécus dans le champ de l’art.
Voir des expositions, les chroniquer dans des magazines ou dans des revues d’art, visiter des foires, rencontrer des artistes, écrire des textes de catalogue: c’est le quotidien de tout critique d’art et commissaire d’exposition.
Mais à force de regarder des œuvres, de les fréquenter, il arrive aussi que l’on rêve d’elles la nuit. La scène transfigurée de l’art se peuple alors d’expositions imaginaires, d’artistes anonymes, d’images traversant l’espace, de crises d’angoisse du curateur. Car, la nuit, tout bouge, tout devient plus flottant, plus aérien, plus spectral.
Depuis 2005, Jean-Max Colard note consciencieusement ses rêves relatifs à l’art — au réveil, parfois au milieu de la nuit ou quelques jours après les avoir faits. Ses réinventions d’un monde d’artistes, d’œuvres et de musées, de foires et de conservateurs, soumises alors au principe d’incertitude, prennent une singulière dimension, celle propre à la transfiguration des identités et des identifications.
Voilà pourquoi ces «rêves critiques» s’offrent aussi comme un moment de liberté, et comme un autre espace d’exposition. Ils expriment également le désir profond d’un autre type d’écriture sur l’art.
«Je rêve une foire d’art contemporain qui aurait lieu chez les gens — suite d’une conversation à table avec l’artiste Gianni Motti. Le visiteur parcourt une liste d’adresses, appartements privés, petits ou grands, chambres de bonnes ou duplex, que les galeristes décorent avec des œuvres à vendre.
Au cours de leurs visites, les collectionneurs enlèvent les tableaux ou les photographies accrochées sur les murs de la chambre, demandent le prix des chaises, achètent les vases, le canapé, la vidéo qui tourne en boucle sur la télévision du salon, emportent les sculptures posées parfois comme un bibelot sur la tablette de la cheminée.
Dans l’un des appartements, on peut aussi repartir avec le rideau de perles de l’américaine Liz Craft installé à l’entrée de la cuisine. Je parcours toute la nuit ces intérieurs soigneusement «dévalisés» — «On le fait?» me demande Gianni.»
Jean-Max Colard
Jean-Max Colard est né en 1968. Il est critique d’art et commissaire d’exposition. Il est également maître de conférences à l’Université de Lille 3 où il enseigne la littérature contemporaine.
La BF15 est située au 11 quai de la Pêcherie, 69001 Lyon.
Rencontre
Vendredi 17 janvier 2014 Ã 19h