Jean-François Guillon
Réduction du paquet d’ondes
Sculptures, installations, photographies, dessins, chacune des productions de Jean-François Guillon envisage de façon sensible l’espace du texte et des idées. Après avoir traité de “l’en-deçà” de l’écriture, il a finalement laissé le texte écrit faire irruption dans son travail : les mots sont souvent articulés dans des poèmes visuels aléatoires, ou des dispositifs aux formes simples conçus à l’occasion d’expositions, d’interventions en milieu urbain, ou sur la scène pour le spectacle vivant.
L’installation principale de cette exposition est un amas hétéroclite constitué de mobilier et d’objets divers récupéré dans la galerie, dont émanent des tiges métalliques. Au bout de chacune de ces tiges est suspendu un crayon qui pend au dessus d’un bloc de papier : la possibilité d’une production autonome de dessins, réalisés par les meubles et objets eux-mêmes est ainsi évoquée. Les dessins, « grattages » abstraits présentés sous l’aspect d’un « work in progress », sont autant de signes à décrypter : des messages dont les meubles et objets seraient les vecteurs.
Cette pratique graphique autonome supposée crée l’illusion d’une capacité des meubles à produire eux-mêmes des signes, indépendemment de toute contrainte de sens. Une lecture possible de l’œuvre pourrait être celle de la restitution graphique par ceux-ci de toutes les ondes qui les traversent, à la manière d’un sismographe.
En physique quantique, pour observer les particules élémentaires, les physiciens parlent de la « réduction du paquet d’ondes ». Un paquet d’onde (ensemble de forme d’ondes) est réduit au moment de l’observation par un observateur qui définit ainsi la probabilité d’une position et d’un mouvement pour une particule donnée. Ainsi, certaines interprétations tendent à démontrer que le monde existe sous une forme donnée, dès lors qu’il est observé à un instant donné : c’est pratiquement l’observateur qui influe sur la forme que prend le monde.
De manière plus poétique, cette installation évoque la possibilité d’un message que le monde des objets pourrait nous livrer, message énigmatique dont les clés ne sont pas données : c’est au spectateur de construire sa propre interprétation de ce message, définissant ainsi sa conception du monde qui l’entoure.
L’exposition comprend également une sculpture de lettres inédite (métal et verre) intitulée Fragile, et les œuvres récentes Qui l’a dit? et La Voie de son Maître. Enfin, dans le fond de la galerie, un amoncellement de cartons annonce le prochain projet de Jean-François Guillon : un travail combiné d’écriture, de sculpture et de performance autour de la figure de l’onomatopée.