L’exposition « Raoul Hausmann. Photographies 1927-1936 » au Jeu de Paume, à Paris, retrace la carrière photographique du plasticien d’origine autrichienne qui fut cofondateur du groupe Dada-Berlin et qui déploya sa créativité de la littérature à la peinture et au dessin, en passant par les collages, les photomontages, dans un foisonnement d’expérimentations.
Raoul Hausmann, dadaïste célèbre mais photographe méconnu
Première rétrospective d’envergure en France consacrée au travail photographique de l’écrivain et plasticien dadaïste, l’exposition « Raoul Hausmann. Photographies 1927-1936 » s’intéresse à ce pan longtemps resté méconnu et sous-estimé de son œuvre. Alors qu’avaient été surtout retenus son rôle crucial au sein de Dada Berlin, et la dimension pionnière de ses assemblages, collages, photomontages et poèmes sonores, l’importance de la production photographique de Raoul Hausmann n’a été que récemment découverte.
Plus de cent trente tirages d’époque, qui ont tous été réalisés par Raoul Hausmann lui-même témoignent de la pratique photographique prolifique dans laquelle l’artiste s’est lancé à partir de 1927, après avoir agité la scène culturelle berlinoise des années 1920 par ses expérimentations en tous genres. Ces clichés font partie des plus de mille tirages qu’il produisit en une décennie de création photographique sensible et lyrique.
Les photographies de Raoul Hausmann célèbrent l’écart et le désordre
Les premières photographies de Raoul Hausmann s’inscrivent dans les paysages des mers Baltique et du Nord : Sans titre (Herbe des dunes) et Sans titre (Pied dans le sable), prises vers 1931, Dune mobile, de septembre 1931. Ces clichés en noir et blanc sont ceux d’un flâneur qui cherche à transmettre son émotion plutôt que de parvenir à une image parfaite. Malgré sa prédilection pour les étendues de dunes, propices à un jeu de lignes et de contrastes, Raoul Hausmann ne livre pas des compositions parfaitement construites et ordonnées mais favorise au contraire les détails éblouissants émergeant des surfaces lisses, comme des interstices de liberté.
Les nus occupent également une place importante dès les premières années de la carrière de photographe de Raoul Hausmann, comme en témoignent les clichés Sans titre (Vera Broïdo), Deux nus féminins allongés sur une plage ou encore Nu sur la plage, au traitement sculptural des corps. Après l’Allemagne, les photographies de Raoul Hausmann le situent à Paris, en Tchécoslovaquie et à Ibiza, suivant son périple à travers l’Europe, chassé par les Nazis.
Le style photographique de Raoul Hausmann, qu’il s’applique aux nus, aux paysages de bord de mer, aux plantes ou encore à l’architecture vernaculaire d’Ibiza, s’inscrit dans une opposition à la vision nazie. A mi-chemin entre les courants de la Nouvelle Objectivité et de la Nouvelle Vision, son travail vise une poésie de l’écart et du désordre face aux normes.