Toby Paterson
Quotidian Aspect
Si les Å“uvres de Toby Paterson puisent à la source du modernisme architectural, c’est pour mieux renouveler la lecture de cet héritage et l’ouvrir à la question du paysage. «Beaucoup de gens pensent que le sujet de mon travail, c’est l’architecture. Ce n’est pas totalement vrai. L’architecture est juste un prétexte à regarder. Le sujet de mon travail, c’est d’observer et de ressentir un environnement donné».
Ses peintures murales, dessins, collages ou modules sculpturaux offrent un singulier mélange d’abstraction poétique et d’expérience physique — un voyage au gré d’espaces transitionnels.
En marge de sa formation plastique, la pratique du skateboard a développé chez Toby Paterson une hyper sensibilité aux textures et structures des matériaux urbains, doublée d’une approche fragmentaire de la ville. Il scrute, documente, puis essentialise et éclate les bâtiments qu’il prélève dans le réel.
Généralement, son processus de travail implique un voyage de recherche, au cours duquel il prend des centaines de photographies de bâtiments d’après-guerre, relevant souvent d’une esthétique de l’ordinaire ou du quotidien.
Ce matériau visuel est alors éprouvé, incorporé tel quel dans certaines compositions picturales (la série des collages-bricolages, ou cartographies mentales d’expériences vécues) ou bien idéalisé dans une version peinte qui amplifie l’abstraction latente de l’image.
Le choix de sa palette — entre les pastels tendres et les aplats de couleurs pures — occupe alors une place majeure dans la recomposition de ce paysage parallèle.
Une autre famille d’œuvres se discerne: les «reliefs hypothétiques», réalisés à distance du voyage, volumes totalement abstraits, qu’il définit comme des «hypothèses subjectives formulées en réponse à une ville — condensation de formes et de couleurs.»
Ces différentes mises en forme de l’expérience témoignent d’une attention particulière aux mouvements d’échelle et aux dynamiques de circulations, aussi bien concrètes — éprouvées par le visiteur dans l’espace d’exposition — que mentales, entre document et mémoire, réel et imaginaire, figuration et abstraction.
Ces va-et-vient sont d’autant plus palpables qu’ils sont volontiers mis en scène par l’artiste. Toby Paterson affectionne les dispositifs d’exposition sophistiqués, qui génèrent déambulation labyrinthique et jeux de trompe-l’œil: insérés dans l’espace au sein de cadres légers ou d’étagères aux finitions parfaites qui rappellent la grille moderniste, ses motifs minutieusement ciselés semblent flotter, presque atmosphériques.
Découpes architecturales en suspens, elles inventent un espace-temps complexe, à la fois référencé et dégagé de toute contrainte matérielle. Un paysage mémoriel en reconfiguration permanente.