C’est une belle boulette que Libération vient de révéler, à travers le récit de l’authentification d’une peinture de l’expressionniste allemand Lyonel Feininger (1871-1956).
Représentant un port de la mer baltique, cette toile de 1915 appartenait au cinéaste Roger Spiri-Mercanton. A sa mort et selon ses voeux, la peinture a été proposée en legs au Centre Pompidou. Non content de l’accueillir parmi ses collections, le musée a souhaité la faire authentifier par un expert, Achim Moeller, qui a déclaré qu’elle ne pouvait pas être originale. Le musée a alors refusé le legs, préférant ne pas prendre de risques.
Pourtant, quelque temps plus tard, ce même expert a démenti ses premières conclusions, arguant de nouvelles recherches, et accrédité l’authenticité de l’oeuvre en fournissant un certificat à la maison Art Curial. Celle-ci a finalement été vendue le 29 mai 2011 pour la coquette somme de 5,77M d’euros.
Le problème n’est pas tant l’avidité de certains experts, qui se proclament «spécialistes» de tel ou tel artiste et exercent en parallèle la fonction de marchand.
Le problème est celui du «pouvoir délirant» qu’ils ont acquis. «Si le marché a ses propres règles, elles ne devraient pas s’appliquer aux musées. Il est inadmissible que l’un d’entre eux, plutôt que d’engager lui-même la recherche et de faire son travail d’histoire de l’art, incapable de se faire sa propre opinion et de prendre ses responsabilités, se réfère à un expert unique et se prive ainsi d’un chef-d’œuvre qui avait toute sa place dans ses collections» (La Tribune de l’art, 26 mai 2011).