Présentation
Katharina Schmidt, Birgit Schlieps, Ulrike Kremeier
Pyramides
Créée par volonté politique dans les années soixante, la ville nouvelle bâtie par l’architecte Jean Balladur s’inscrit dans le grand mouvement moderniste du siècle passé, caractérisé par le gigantisme et la rigueur formelle. Les deux artistes traquent les formes (triangle, lunette, haricot, losange) qui animent la structure des bâtiments monumentaux et se retrouvent dans chaque détail de la ville.
Le dialogue entre les deux pratiques artistiques (précision du trait, cadrage de la photo) fait émerger une ambiance propre à ce cas particulier de l’habitat urbain. Dans cette ville-loisir, lieu de vacances de générations de Français, les pyramides de La Grande Motte nous contemplent du haut de leur géométrie parfaite et de leurs dimensions babyloniennes.
La déambulation croisée de Birgit Schlieps et Katharina Schmidt laisse place à la possible ambivalence des sentiments: dans une telle monumentalité, sommes-nous exaucés dans nos vœux de divertissements et de dépaysement (atteindre l’Éden, voir les Fidji), ou ne sommes-nous qu’enserrés dans une ville-ruche aux contours alvéolaires?
«Le caractère global, artistique et utopique de La Grande Motte est pour l’occasion d’ouvrir un dialogue au croisement de la photographie et du dessin. Dans ces deux médias, elles suivent les mouvements et les motifs qu’elles trouvent dans la ville. Ceux-ci en sont extraits et sont comprimés, répétés et placés les uns à côté des autres. Cela crée des points de friction et des intersections qui éclairent le caractère spécifique de chacune des deux formes d’expression.
Mais en filigrane, c’est aussi la validité actuelle de l’architecture de Jean Balladur qui est questionnée: la fragmentation de ces éléments soulève d’une part une fascination pour les inventions formelles spécifiques, caractéristiques de l’optimisme de l’époque, à planifier ainsi de manière globale, et d’autre part des doutes quant au caractère autoritaire d’un tel projet.»
Ulrike Kremeier, Extrait