Ismaïl Bahri
Précipités
«D’abord on n’y voit rien. Un verre, un reflet, puis une main qui le ramasse. Puis se dessine, à la surface du liquide noir, quelques ondes, des secousses. Le verre déborde, l’encre s’étale sur la peau, s’échappe, par sursauts, sur le pouce, sur les doigts. Quelques secondes. L’encre ne cesse de s’enfuir.
C’est presque irréel, elle coule, elle imprime sa marque autour d’elle; le verre ne se vide pas. Infime, ce ne sont que gouttes et pourtant, elle a déjà envahi son support.
Quelques secondes encore, puis un bâtiment, un arbre peut-être, passés au négatif d’une encre noire, à travers l’axe de symétrie de la réflexion; l’image inversée de notre univers émerge. Le voyage sidérant d’Orientations, vidéo emblématique d’Ismaïl Bahri peut démarrer. Car dans ce parcours à travers la ville, avec pour seule ligne d’horizon la surface d’un verre, se jouent toutes les problématiques d’une Å“uvre singulière, qui ne s’empare de l’infime que pour en montrer le possible vertige.
Polymorphe, son art passe par la photographie, la vidéo, le dessin ou l’installation comme autant de moyens de rejouer l’acte du «retrait», de faire naître sinon un événement, du moins une posture face à lui. Et si elle paraît insaisissable, se défiant des codes et de la représentation, la démarche de l’artiste n’a rien d’une dérobade. Car le retrait dépose une trace ou, comme il l’évoque lui-même, «attire l’attention par son désistement même». C’est précisément cette pudeur à l’œuvre qui fait de son travail un générateur de possibilités de sens.»
Guillaume Benoit.
Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Marie-Jeanne Caprasse sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.
critique
Précipités & Erratum musicale