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Pour l’histoire de l’art

Depuis peu, l’enseignement de l’histoire de l’art a été ajouté aux programmes de l’Education nationale. L’actuel directeur de la Villa Médicis de Rome propose un état des lieux de cette discipline: comment mieux définir son champ d’application, ses objets, les façons de la transmettre.

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Présentation
Eric de Chassey
Pour l’histoire de l’art

Extrait
L’histoire de l’art part toujours d’objets, de cette sorte d’objets que nous appréhendons par les yeux et que l’on pourrait appeler des objets visuels, même si ce n’est pas forcément la seule manière de les appréhender.

Parce qu’ils sont des objets visuels, ils sont aussi des images et peuvent être reproduits sur un support à deux dimensions, tel qu’une photographie, un écran de télévision ou d’ordinateur, etc. Ces objets visuels peuvent avoir été fabriqués à des époques plus ou moins reculées et dans toutes les régions du monde. Cet objet est le plus souvent, mais pas nécessairement, une oeuvre d’art qualifiée comme telle. La première fois où il devient une oeuvre d’art, ce peut tout à fait être à travers l’intérêt que lui porte un historien de l’art.

Si l’on pense qu’une oeuvre d’art est un objet auquel on attache suffisamment d’intérêt pour en faire un objet d’étude, auquel on prêtera un regard long, une attention soutenue, finalement, peu importe que cet objet ait été adoubé par des générations comme étant bel et bien de l’art, peu importe mミme qu’il provienne d’une culture pour laquelle la catégorie “art” a un sens, ce qui est le cas de la plupart des cultures dans le monde et dans l’histoire.

Il n’y a donc pas d’opposition fondamentale entre l’histoire de l’art et l’histoire de la culture visuelle –qui se préoccupe de tous les types d’images– ni d’ailleurs entre l’histoire de l’art et l’anthropologie visuelle– qui étudie l’usage des images par les sociétés humaines.

Par ailleurs, il existe des objets qui n’ont pas été fabriqués, ni par un artiste connu ni par aucun humain, et que pourtant on peut considérer comme objets d’art. Il peut même s’agir d’un objet trouvé que quelqu’un, un artiste éventuellement, mais aussi un collectionneur, n’importe qui en fait, y compris vous-même si vous le décidez, a choisi et singularisé.

C’est ainsi que les Chinois valorisent depuis la période Song ce qu’on appelle des “pierres de lettrés” (gongshi). Ce sont des concrétions rocheuses aux formes souvent compliquées, qui sont proposées comme objets à la contemplation: dans le contexte mondialisé qui est le nôtre, ces pierres peuvent alors être considérées comme des objets d’art et être exposées dans des musées, non pas pour leurs supports parfois très ouvragés, mais pour elles-mêmes.

Je dis que ce sont des objets et l’on me rétorquera sans doute que, pour ce qui concerne l’art depuis le xxe siècle, il y a de plus en plus d’oeuvres d’art qui sont des performances, des événements ou bien même simplement des situations: mais, dès lors que ces derniers peuvent être considérés comme de l’art, leur transmission s’effectue presque toujours par l’intermédiaire d’images.

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