L’exposition « Picasso-Giacometti » au Musée Picasso jette la lumière sur les relations méconnues qu’ont entretenues Pablo Picasso et Alberto Giacometti. Plusieurs œuvres majeures des deux artistes sont présentées ainsi que des dessins inédits, des plâtres rarement exposés et de nombreux documents d’archives montrés pour la première fois.
Pablo Picasso et Alberto Giacometti : deux génies précoces
Le parcours, à la fois thématique et chronologique, s’intéresse à l’ensemble de la création artistique de Pablo Picasso et Alberto Giacometti, qu’il s’agisse de peinture, de dessin ou de sculpture.
La première partie de l’exposition retrace la progression des deux artistes, des œuvres de jeunesse aux productions modernistes. Les tableaux Fillette aux pieds nus de Pablo Picasso et Nature morte aux pommes d’Alberto Giacometti, réalisés l’un comme l’autre à l’âge de quatorze ans, témoignent de leur génie précoce. Ces premières œuvres sont caractérisées par un style qui se veut fidèle à la réalité.
Une interrogation commune sur la relation de l’art au réel unit Pablo Picasso et Alberto Giacometti. Devant le constat qu’ils font tous deux qu’il n’est pas possible de sculpter de façon parfaitement réaliste un portrait, ils suivent des logiques parallèles. Ainsi, la sculpture en plâtre d’Alberto Giacometti intitulée Femme cuillère, réalisée en 1927, emprunte les méthodes cubistes de stylisation des traits et de la composition en facettes que Pablo Picasso avait introduites avec portrait sculpté de Fernande Olivier.
Un intérêt commun pour Eros et Thanatos
Les affinités formelles entre les œuvres des deux artistes se doublent d’affinités thématiques. Tous deux s’intéressent au devenir du corps après la mort qui le transforme en simple objet matériel. Plus largement, ils partagent une réflexion sur la matérialisation et la chosification du corps. Leurs œuvres comportent de nombreuses figures mortuaires, gisants, crânes et têtes de mort. Ainsi La Mort de Casagemas de Pablo Picasso, représentation de la tête de son ami poètequi s’était suicidé et Tête sur tige d’Alberto Giacometti.
Autre fascination commune : celle pour la relation entre Éros et Thanatos. Dans de nombreuses œuvres des deux artistes, l’instinct de vie, symbolisé par les pulsions sexuelles, est lié à celui de mort. La violence des ébats visibles dans large peinture de Picasso intitulée Figures au bord de la mer, où les deux corps déformés semblent s’entre-dévorer, fait écho à celle de la sculpture Femme égorgée d’Alberto Giacometti. Chez l’un comme chez l’autre, les scènes d’amour sont marquées par des torsions et découpages du corps humain qui semblent autant l’œuvre d’Eros que de Thanatos.
Des documents inédits, carnets, esquisses, croquis et annotations retrouvés dans les archives prouvent la relation amicale qui a lié Pablo Picasso et Alberto Giacometti. De leur première rencontre en 1931 au début des années 1950, les deux artistes sont très proches, échangent beaucoup et se rendent souvent visite dans leur atelier respectif.