ART | CRITIQUE

Pêcher l’eau

PNatalia Grigorieva
@12 Jan 2008

La peinture d’Olivier Masmonteil tire ses racines d’un terreau typiquement français. En atteste le titre de l’exposition, «Pêcher l’eau», référence à une variante de la pêche à la mouche dont le peintre est un adepte. Ce traditionalisme apparent, non dénué de charme, est trompeur: l’artiste n’hésite pas à innover et à surprendre en mariant adroitement le classique et le contemporain.

Olivier Masmonteil manipule la lumière, la rend étrange et inattendue, irréaliste. Ses toiles célèbrent la symbiose du classique et du contemporain, nourrie par l’admiration des maîtres comme Jan van Goyen ou Salomon et Jacob van Ruysdaël, la photographie contemporaine, le souvenir et l’observation. En véritable explorateur, Olivier Masmonteil diversifie les manières d’exploiter le paysage, s’attache à parcourir ses étendues dans le but d’être surpris par les possibilités de figuration qui s’offrent à lui. Il réinvente continuellement son sujet, réinterprète sans cesse la réalité. Son travail est un kaléidoscope qui produit des images nouvelles à partir d’éléments prédéfinis et prouve que peindre des paysages au XXe siècle n’est pas totalement dépassé.

Masmonteil est un explorateur romantique ayant choisi de vouer son art exclusivement au paysage. Sentier accidenté, chemin semé de clichés et de lieux communs, ce sujet est aussi vieux que la peinture elle-même. Les paysages de l’artiste, moins torturés que ceux de Ronan Barrot, plus chaleureux que ceux de Per Kirkeby, brillent par leur unicité dans le panorama de la création contemporaine: ils placent le peintre délibérément en marge des mouvements de mode et évoluent constamment.

Après avoir dessiné des papillons sur fond de cascades, des arbres en ombres chinoises au crépuscule, ou s’être essayé au fusain, Masmonteil réalise un ensemble de travaux des plus intrigants. Son style devient de plus en plus sophistiqué et captivant.

Avec «Pêcher l’eau», il dévie du chemin strict de la figuration pour flirter, quoique timidement, avec l’abstraction. Ses œuvres récentes se divisent clairement en deux catégories. Les premières ramènent une partie du paysage au premier plan et fondent ses détails en rubans parallèles aux couleurs électriques, tandis que le second plan du tableau reste parfaitement réaliste. L’oeil hypnotisé se noie dans les vibrations de ces bandes dont la nature véritable reste inexpliquée. Ciel et terre tendent à se confondre, à s’inverser, à fusionner. A tel point que les toiles pourraient presque être regardées à l’envers.

La deuxième catégorie de tableaux, plus subtile, joue sur la présence d’éléments inattendus ainsi que sur les contrastes osés entre couleurs et entre formes. Tantôt une discrète présence bleutée et fantomatique vient relever l’atmosphère d’un paysage vide, tantôt des silhouettes de palmiers d’un bleu franc, à peine esquissées, surprennent au sein d’un décor majoritairement classique. Des fluides et des ondes sinusoïdales coulent à ras du sol et, par leur dynamique, bousculent un ensemble de quiétude. Un orange brûlant et un bleu profond, un rose et un vert d’eau sont à l’origine de contrastes étonnants.

English translation : Laura Hunt
Traducciòn española : Santiago Borja

Olivier Masmonteil:
— Stiller Sturm, 2006. Huile sur toile. 180 x 200 cm.
— Stiller Sturm, 2006. Huile sur toile. 200 x 250 cm.
— Sans titre , 2006. Huile sur toile. 230 x 250 cm.
— Sans titre , 2006. Huile sur toile. 230 x 300 cm.
— Sans titre, 2006. Huile sur toile. 180 x 160 cm.

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