Avec la série des « Paysages romantiques », Joachim Mogarra propose une version étonnante et décalée des lieux et thèmes pittoresques de cette période de l’histoire de l’art : montagne, grotte, voyageur solitaire apparaissent, sujets isolés sur un fond noir ou baignés dans une ambiance lumineuse vaporeuse. Mais la montagne est un glaçon éclairé à la lampe de poche, la grotte, un bouchon de liège creusé au milieu, et le voyageur, un simple jouet !
Le travail de la lumière, le cadrage en contre-plongée, la grandeur des formats et le rendu charbonneux des tirages permettent en fait à l’artiste de créer de véritables ambiances qui transforment ces objets quotidiens, les extraient de leur contexte pour n’en garder que la forme et les effets de matière.
Eclairés par derrière, le sucre et la glace deviennent translucides. Mogarra s’empare de ces denrées de base pour y sculpter des temples mystérieux ou un Paysage métaphysique dont les contours gracieux se détachent sur un fond indéterminé.
Les arrières plans sont volontairement flous, animés de lumières diffuses donnant l’impression d’un espace illimité, d’un paysage enseveli sous la brume dont ne se distinguerait que quelques détails. Mogarra met ainsi en place une économie de l’image basée sur l’ellipse et les raccourcis. Jouant également avec le hors champ, il enrichit son image de possibles, encourageant le spectateur à prolonger son voyage imaginaire au-delà de ce qu’il voit.
Souvent, les objets et thématiques sont choisis pour leur exotisme, leur caractère grandiloquent ou majestueux. On pense à la série de reproductions stéréotypées des monuments célèbres, à la série intitulée « Les plus hauts sommets » où un cache pot blanc retourné fait office de Mont Blanc et une corbeille de Nanga Parbat.
Une relation d’ordre ironique se met ainsi en place entre l’objet représenté et son référent, que souligne généralement une légende manuscrite. Il s’agit toujours de faire grand avec des petits objets et un espace limité, d’incarner l’exceptionnel avec le prosaïque.
C’est probablement ce jeu qui rend les propositions plastiques de Mogarra si séduisantes. Les techniques élaborées de création de l’image sont remplacées par une aptitude à glaner, dans les objets du quotidien, les conditions de possibilité du voyage imaginaire, du bricolage de visions fantastiques.
Joachim Mogarra
— Le Mausolée, série des « Paysages romantiques », 2004. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— Sur le fleuve, série des « Paysages romantiques », 2004. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— Le Voyageur, série des « Paysages romantiques », 2004. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— Le Temple sur l’île, série des « Paysages romantiques », 2004. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— Paysage métaphysique, série des « Paysages romantiques », 2003. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— Sur la lande, série des « Paysages romantiques », 2003. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— La Grotte, série des « Paysages romantiques », 2003. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— Sunrise in the Mountains, série des « Paysages romantiques », 2004. Photo noir et blanc. 100 x 150 cm.
— Midnight Series, « Histoires en série », 2003. 15 photos noir et blanc. 30 x 40 cm (chaque).
— So Pretty Horses, « Histoires en série », 2004. 15 photos noir et blanc. 30 x 40 cm (chaque).
— Les Éclipses du 17 aout 2004, « Histoires en série », 2004. 16 photos noir et blanc. 30 x 40 cm (chaque).
— Le Slip, série « Aventure de proximité », 2004. Gouache sur photo noir et blanc. 50 x 60 cm.
— la Lune, série « Aventure de proximité », 2004. Gouache sur photo noir et blanc. 80 x 100 cm.
— Mr Mog, série « Aventure de proximité », 2004. Gouache sur photo noir et blanc. 50 x 60 cm.