PHOTO | CRITIQUE

Paul Pouvreau

PPhilippe Coubetergues
@12 Jan 2008

Photographies d’objets rudimentaires, de caisses en carton et de sacs en plastique ; assemblages et installations de caisses vides amoncelées. Images d’apparence sans qualité qui révèlent un goût prononcé pour la peinture, une réflexion sur la culture et la nature de l’image.

Paul Pouvreau expose ses œuvres récentes à la galerie Filles-du-Calvaire. Au rez-de-chaussée, une construction imposante de cartons assemblés : un monument clos sur les quatre côtés, un assemblage monolithique, un bloc de cartons vides superposés. Au mur quelques premières photos : une photo d’étagères métalliques alignées surmontées de cartons d’emballage, la photo d’une colonne de cartons superposés derrière laquelle se cache un personnage, plus loin, la photo d’un personnage en mouvement une branche morte à la main, etc.

A l’étage, d’autres images en plans plus rapprochés, des images simplifiées de quelques objets assemblés, telle cette boite d’ampoule surmontée d’un sac en plastique ; et de nouveau cette construction que l’on découvre cette fois du dessus (l’étage est en mezzanine) recouverte d’une image encollée et de quelques sacs de plastique froissé.
Paul Pouvreau fait donc de la photographie d’objets rudimentaires, de caisses en carton et de sacs en plastique ; il pratique également l’assemblage et l’installation, le plus souvent sous la forme de caisses vides amoncelées et en y intégrant parfois des images. La figure humaine apparaît quelquefois furtivement dans le champ, partiellement dissimulée, anonyme.

Notons tout d’abord que les emballages cartonnés ou plastifiés qu’utilise l’artiste sont eux-mêmes recouverts d’images : dessins élémentaires se rapportant au contenu, une série de casseroles, un verre de vin rouge, un faitout, un logo, etc. L’air de rien, l’élément iconique prend tout son poids dans l’image. Initialement conçu pour informer par le contenant d’un contenu protégé, réservé, idéalisé, ils reprennent ici du service dans le dispositif photographique de façon détournée. Mais, ils marquent cette fois le contenu de l’image et associés entre eux, participent d’une nouvelle et globale iconologie.

Notons également que ces images infiltrées dans l’image instaurent un jeu dialectique avec leur environnement immédiat. Ces deux constituants de l’image ne relèvent pas d’un même degré de représentation. Nous pourrions admettre que le contexte est au premier niveau et le motif au second. S’en suivent les décalages que l’on imagine interprétables comme autant de correspondances significatives et de liens métaphoriques. Il n’en faudrait pas plus pour donner à l’image sa portée allégorique. C’est ce que l’artiste parvient parfois à démontrer.

Notons enfin que les compositions sont centrées sinon parfaitement équilibrées, pour tout dire calculées de façon affichée. L’échelonnement des plans oriente clairement la lisibilité tout comme le choix du point de vue ou celui de l’éclairage. Derrière l’image : le tableau. Et sans doute pas n’importe quels tableaux sans pour autant que l’on puisse jamais en reconnaître un. La référence se maintient à son seul principe. C’est la mécanique de l’image qui semble être visée.

Ainsi, derrière les images d’apparence sans qualité de Pouvreau se révèlent un goût prononcé pour la peinture, une réflexion sur la culture et la nature de l’image, admettons pour la nature morte.

Sous cet angle, l’apparition de la figure humaine doit-elle être interprétée comme un penchant récent pour le portrait ou la peinture d’histoire ? On serait tenté de formuler une question comparable concernant la place de la sculpture dans la pratique de l’artiste sans la conviction que cette piste mérite d’être suivie plus avant. Cela participe du caractère énigmatique de l’œuvre. La référence irrésolue, le dénuement caractérisé, l’évidence évidée, le jeu élémentaire du rudimentaire : un véritable rébus de rebus qui nous replace face à une certaine réalité quotidienne mais plus tout à fait dans les mêmes dispositions.

Paul Pouvreau :
— Sans titre, 2002. Tirage argentique. 118 x 183 cm.
— Le Serre-joints, 2002. Tirage argentique. 59 x 87 cm.
— Sans titre, 2002. Tirage argentique. 123 x 153 cm.
— La Soupe, 2002. Tirage argentique. 123 x 84 cm.
— Camouflage, 2002. Tirage argentique. 85 x 125 cm.
— Sans titre, série « Faits divers », 2003 Tirage argentique. 76 x 102 cm. et 30 x 45 cm.
— Sans titre, série « Faits divers », 2003 Tirage argentique. 76 x 102 cm et 30 x 45 cm.
— Sans titre, série « Faits divers », 2003 Tirage argentique. 76 x 102 cm et 30 x 45 cm.
— Sans titre, série « Faits divers », 2003 Tirage argentique. 76 x 102 cm et 30 x 45 cm.
— Sans titre, série « Faits divers », 2003 Tirage argentique 76 x 102 cm et 30 x 45 cm.
— Le Coup de poing, 2002. Tirage argentique Tirage limité à 5 exemplaires 98 x 134 cm.
— Sans titre, 2004. Diptyque, tirages argentiques. 89 x 59 cm.
— Eve, 2003. Diptyque, tirage argentique. 83 x 122 cm.
— Les Oreilles, 2001. Tirage couleur plastifié brillant contrecollé sur aluminium. 62 x 82 cm.

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