Par Marie-Jeanne Caprasse
Se confronter aux toiles de Paul Pagk, c’est faire l’expérience physique de la peinture. Chaque toile nous apparaît comme une caisse de résonance. Résonance entre les textures, les couleurs, les aplats et les lignes, les surfaces brillantes et mates. Le peintre travaille ses couleurs comme un orfèvre, il élabore lui-même sa peinture à base de pigments et une tempera à l’œuf et à l’huile. Le mélange obtenu, il pose patiemment couche sur couche pour obtenir la juste densité des nuances et surtout la lumière colorée qui en émane.
Frappé par les œuvres au néon de James Turrell, son travail repose sur une question majeure : comment créer en peinture une surface d’où la couleur émane, arriver à une telle saturation des couleurs qu’elles diffusent leur lumière teintée vers l’extérieur du tableau.
Ses compositions d’apparence simple sont le fruit d’un langage personnel fait de traits et de plans de couleurs, qu’il complexifie par le biais de cette recherche sur la lumière. Dans un désir de faire dialoguer le spectateur avec ses toiles, il use de formes ouvertes et fermées, rythmant le plan de la toile. Ses structures tubulaires, à la manière des dessins de Escher, troublent nos repères spatiaux et laissent flotter le regard dans un espace indéterminé.
Les compositions sont géométriques, elles émanent d’un esprit mathématique mais le traitement sensuel de la peinture leur donne une âme, une expression qui touche notre sensibilité. Ses toiles gardent une spontanéité et une légèreté grâce au fait qu’il travaille le motif directement sur la toile, à main libre. Et l’on peut y distinguer les traces de ses repentirs qui sont comme les cicatrices du tableau qui affleurent à sa surface.
Paul Pagk joue avec les formes géométriques en recherchant l’équilibre dans l’espace plan de la toile. La profondeur, il l’obtient par le degré d’intensité lumineuse de ses couleurs. Son art réside dans la subtilité des recouvrements qui donnent une véritable puissance colorée à ses créations. Les reproductions de ses œuvres ne peuvent témoigner des effets de matière et de lumière qui sont en jeu. C’est pourquoi, comme pour apprécier un Rothko, il ne faudra pas manquer l’occasion d’en faire l’expérience concrète à la galerie Eric Dupont.
Paul Pagk
—Les Bandes, 2000-2007. Huile sur toile. 150,5 x 155,5cm.
—Two by three, 2000-2007. Huile sur toile. 165 x 188,5cm.
—Lemonaid, 200-2007. Huile sur toile. 188 x 188cm.
—Link, 2003-2004. Huile sur toile. 165 x 188,5cm.
—Inland, 2000-2007. Huile sur toile. 150 x 155,5cm.