Paul Pagk
Paul Pagk
Paul Pagk appartient à plusieurs cultures. Né d’un père tchèque et d’une mère anglaise, peintre elle-même qui l’a initié très tôt à l’art, il a fait ses études à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris. Il découvre dans les années 80, les Å“uvres de Blinky Palermo, d’Imi Knoebel ou de Beuys… des Å“uvres qui exerceront sur lui une grande influence et confirmeront son choix de la «voie» de la peinture abstraite. Il vit et travaille aujourd’hui à New York.
Paul Pagk est avant tout un peintre, abstrait de surcroît, ce qui souligne sa singularité à l’âge du numérique. Pour le situer dans l’histoire de la peinture, il appartient à la lignée qui irait, disons de Kasimir Malevitch en passant par les Constructivistes russes, El Lissitzky, le Bauhaus de Joseph Albers, Donald Judd, Sol LeWitt, jusqu’à Blinky Palermo, — peintres dont il est assurément l’un des dignes héritiers spirituels.
Ce qui «frappe» au sens propre du terme dans les peintures de Paul Pagk, c’est avant tout la lumière très dense qu’elles émanent, qu’elles nous renvoient par l’intermédiaire de la couleur. Le choix des couleurs souvent d’ailleurs associées à leurs complémentaires, telles que le violet de Hold me tight, le bleu de Meren Ptah, le bleu plus sombre de Musing’s, le rouge de Untitled Red desert par exemple est très subtil. C’est là un point de la grande réussite de sa peinture, c’est qu’elle nous «touche» directement; nous en faisons l’expérience avec notre corps.
Paul Pagk est très attaché à cette expérience corporelle; ce rapport intime de la couleur, du dessin et de ce corps qui les conçoit mais aussi de celui qui les reçoit. Car Paul Pagk est avant tout un peintre et son sujet est la peinture. Il s’inscrit dans la tradition de la grande peinture. Il fabrique lui-même ses couleurs à l’huile mélangées patiemment avec des pigments purs. Le temps ne semble pas avoir de prise sur sa peinture qui s’élabore lentement couche après couche, ligne après ligne. Eloge donc de la lenteur dans un monde survolté. «A la recherche de l’absolu», pour reprendre un titre de littérature, sa pierre philosophale en quelque sorte.
Sa peinture s’élabore et garde toute l’énergie dans ses différentes strates, dans son derme jusqu’à son épiderme. Paul Pagk dessine, recouvre, incise, nielle des lignes géométriques qui laissent apparaître les différentes couches de couleur et remonter cette énergie.
Ainsi naissent des espaces géométriques, des formes (comme dans Two triangles ou Musing’s), des perspectives illusoires, en opposition à la profondeur, à l’épaisseur de la «peau» de ses peintures.
Nous en faisons pleinement l’expérience. Dans ses dernières toiles, les formes se complexifient comme pour mieux révéler cette opposition, pour trouver un juste équilibre entre l’épaisseur réelle et la profondeur toute illusoire. A l’heure où nous parlons d’un renouveau de la peinture abstraite, Paul Pagk singulièrement et même à contre courant, ouvre ainsi une voie d’une peinture géométrique dense, sensible, tactile, «une peinture abstraite à fleur de peau».
Pascal Blanchard, Paul Pagk ou «l’Abstraction à fleur de peau»