Alors que l’Etat français peine à entretenir les monuments et les musées dont il a la charge et essaie parfois de s’en délester, un rapport a été présenté par le premier ministre via le Conseil d’analyse économique (CAE) sur la question du financement du patrimoine. Trouver de nouvelles sources de revenus est devenu aujourd’hui une nécessité.
Fort heureusement, les auteurs rejettent la piste de la vente des biens culturels de l’Etat sur le marché. Mais ils suggèrent deux mesures qui pourraient bien affecter l’éthique du patrimoine, telle qu’elle a été élaborée au moment de la révolution française.
La première mesure serait la hausse du tarif d’entrée dans les musées et les monuments pour les visiteurs non européens. Egalement flexibles selon la période et l’heure de visite, les différents tarifs permettraient de contrebalancer les problèmes d’affluence.
La seconde mesure préconisée concerne la hausse de la taxe de séjour pour les clients des hôtels. Si elle passait de 2% à 6%, la taxe rapporterait 1 milliard d’euros par an.
Déjà appliquées dans d’autres pays du monde, ces mesures simples et ciblées semblent appropriées.
Mais ce rapport soulève malgré tout des inquiétudes.
D’une part, on est en droit de douter que la hausse des tarifs permettra d’endiguer le «star system» qui caractérise la fréquentation du patrimoine en France (1% seulement des 1212 musées concentre le public). Pour cela, il faudrait que les bénéfices soient redistribués de manière fair-play aux petits musées et monuments, plutôt que conservés jalousement par les grands.
D’autre part, un autre point nous chagrine. Le rapport suggère la cession d’œuvres d’art pour relancer les acquisitions dans les musées. Ainsi, il remet en question le principe éthique de l’inaliénabilité des collections publiques.
Comment peut-on croire que la marchandisation du patrimoine est une solution pour garantir son existence, alors qu’elle susciterait au contraire sa disparition pure et simple?