Michelle Debat: Lorsque déjà l’an dernier, je vous avez demandé si vous verriez spontanément une photographie (de danse) qui représenterait ce qu’est la danse pour vous?, vous m’aviez répondu très rapidement et avec une sorte d’évidence qu’une photographie de Jeff Wall pouvait être une photographie «de danse». Cela en fait ne m’avait pas tout à fait surpris et m’avait déjà donné envie d’en savoir davantage… Pourriez-vous aujourd’hui nous dire en quoi pour vous les ou la photographie plus précisément de Jeff Wall, est une photographie «de danse» où peut-être une photographie où il y aurait de la danse et pourquoi ?
Mathilde Monnier: Ce qui me plaît chez Jeff Wall c’est que ce sont des photographies qui donnent à réfléchir et qui renvoient une vision du monde complexe, contextualisée à chaque fois très précisément mais aussi une photographie très construite avec une dramaturgie, un rapport au temps et au mouvement. Je revois cette photographie ou plusieurs hommes sont au bord d’une rivière et des papiers s’envolent dans une sorte de bourrasque et où tout le paysage semble pris dans le mouvement de ce vent qui emporte tout. En cela, je peux imaginer que ces photographies rejoignent la danse ou en tous les cas le spectacle, la mise en scène.
Michelle Debat: Pourriez-vous alors citer une photographie qui aurait été faite de vos propres pièces et qui représenterait ou symboliserait votre démarche personnelle? L’an dernier vous m’aviez proposé celle-ci (Déroutes, 2003), pourriez vous nous dire pourquoi ?
Mathilde Monnier: C’est difficile de choisir une photographie mais celle de Déroutes est assez évocatrice de mon travail, car dans ce renversement de la danse il y a beaucoup de choses sur lesquels je travaille. D’abord c’est dans le texte de Buchner la figure la plus importante quand Lenz voit d’un coup le ciel au-dessus de lui et sans doute qu’ à ce moment là il voit qu’il n’y a rien dans le ciel, ou simplement les nuages. Donc c’est une posture, cette photographie tout d’abord est une posture d’observation puis une posture à la fois physique et mentale. Les pieds sont en haut, mis en avant, comme si c’étaient eux qui portaient le ciel.
Michelle Debat: En revoyant quasi-chronologiquement vos créations, certaines m’ont paru tout à fait intéressantes quant à vos propres réflexions sur ce que la danse peut nourrir et recevoir de certaines collaborations ou références du champ des arts.
D’où vous vient ce désir de croiser les champs disciplinaires des arts plastiques dans votre propre travail de chorégraphe? En quoi déplace-t-il ou non votre propre construction de danseuse et de chorégraphe mais en quoi aussi rejoint-il votre propre conception de ce qu’est ou pourrait s’entendre comme étant de la danse, un art du mouvement, du déplacement, de l’espace, d’une temporalité intérieure, d’une mémoire de l’ordre de la kinésis?
Mathilde Monnier: Je n’ai jamais eu un désir si clair de croiser les champs en tous les cas pas d’un point de vue conceptuel mais par contre j’ai toujours pensé que la danse avait besoin de repousser ses limites et que dans un autre mouvement elle pouvait collaborer très facilement avec les autres car elle est perméable. Et puis la danse a derrière elle toute cette tradition historique de croisements des arts, que ce soit le Bauhaus ou bien la Judson Church. La danse en permanence flirte avec les autres arts et je ne voulais pas me contenter de rester au cœur de mon médium, je préférais aller vers les bords.
Michelle Debat: En découvrant l’une de vos premières créations en 1984, Extasis (créé à New-York en 1984 et retransmise à deux jeunes danseurs en 2011 à la Cité Internationale à Paris), il m’a semblé que déjà, certains actes photographiques ou mêmes références étaient là: ainsi la question du détourage des deux danseurs, par la lumière, la mise en place d’un quasi studio photographique comme dispositif scénique, l’impact des ombres portées sur le déplacement des danseurs et donc sur l’implication du regard du spectateur, parfois on pouvait y retrouver des photographies de Brassaï (femmes sous les lampadaires des années 30 à Paris), on pouvait aussi retrouver dans un travail chorégraphique sur le ralenti, des dédoublements, répétitions proches des images photographiques d’Etienne-Jules Marey lorsqu’il s’intéressait et à la physiologie du corps et à l’analyse du mouvement en passant par des phases de décomposition de celui-ci. Enfin des sensations d’arrêts sur image traversent aussi cette pièce de «jeunesse»? qu’en est-il donc pour vous de ces «visions photographiques» dans cette création?
Mathilde Monnier: À cette époque nous étions à New-York et je voyais et aimais déjà la photographie. Je me souviens que j’ai découvert Diane Arbus en 84 – maintenant elle est très connue en France – puis Cindy Sherman puis aussi Claude Cahun par hasard d’ailleurs, dans une petite librairie à New York, donc des femmes photographes qui m’ont accompagnée toute ma vie. Bien sûr je connaissais les travaux de Marey et de Muybridge et cela nous fascinait déjà. C’est sans doute pour cela que nous voulions utiliser l’espace de la scène comme un studio photo mais aussi parce que nous aimions beaucoup le matériel des projecteurs, des fluos et que nous voulions que les gens les voient aussi.
Michelle Debat: Un peu plus tard, lors des journées chorégraphiques de Rouen, en 1997, je découvrais Arrêtez, arrêtons, arrête où un plateau hérissé de barres métalliques offrait aux danseurs la possibilité d’inventer des trajectoires et des enroulements de corps autour de ces tiges verticales tandis qu’un conférencier déjà assis délivrait un texte de Christine Angot. Entre rythmique syntaxique et rythmes de corps s’élançant, sautant, traversant la scène dans des impulsions tout aussi musicales qu’instantanées, s’installait une impression paradoxale à la fois «d’arrêt sur image» et de fuites impondérables ou plutôt de déchirures d’un espace sus-divisé, impossible à cadrer et pourtant faisant espace, comme lorsqu’un photographe tente de saisir en vain un groupe en train de se déplacer, et propose l’image d’un espace en incessante mouvance? est-ce que l’image chorégraphique ainsi produite est de l’ordre d’une tentation de faire image là où il n’y aurait que des «sauts» d’images… des gestes inconnus, parfois proches de la folie, gestes à prendre ou à sur-prendre le temps d’une extériorisation de l’ordre d’un instant fou, improbable, et pourtant advenu aussi subrepticement qu’il disparaîtra? Quel est ce rapport d’images à images, images chorégraphiques et désir d’images impossibles à «arrêter»?
Mathilde Monnier: “Arrêtez”, oui je n ‘ai pas pensé à la scansion de «image par image» mais par contre vous avez raison il y a la question du cadre dans cette pièce ou plutôt du décadrement. Car c’est une pièce qui est de coté tout le temps chaque danseur est un peu à coté de lui même un peu décalé car toutes les postures de corps sont tronquées. Il n’y a pas de véritables arrêts image mais une tentative de «fixer» des postures comme les névroses sont fixées ou comme le corps se trouve pris dans des fixations. Il est impossible d’arrêter, cela ne peut qu’être un paradoxe dans cette pièce. Je ne travaille pas l’arrêt qui est trop figé pour moi mais la suspension pour donner aux spectateurs une autre valeur de temps ou pour soutenir un mouvement.
Michelle Debat: Cette sensation d’arrêt sur image il me semble la retrouver dans d’autres de vos chorégraphies, déjà dans Pour Antigone (1991) où là-même il y est vu une sorte de répétition du même mouvement par deux danseurs le temps d’un courte trajectoire, faisant d’eux une sorte de jumeaux ou de «frères de danse» quelque soit leur origine géographique, territoriale… Quel est ce rapport au double alors, à la répétition, que la sensation d’arrêt sur image provoque et qui pourrait être de l’ordre d’un acte de photographie: le double, la répétition, la coupe d’un espace-temps…
Mathilde Monnier: La répétition est importante car oui elle sert à fixer un mouvement dans la mémoire du spectateur et permet une image plus forte . Il y a aussi beaucoup de double ( dont certaines viennent du travail de diane Arbus ) car le double sur scène permet de perdre le spectateur, de le confondre, de le troubler. Le double c’est le trouble et c’est du coup un outil qui apporte de l émotion.
Michelle Debat: Je n’ai malheureusement pas vu Signé, Signés (2001) (qui comporte deux pièces) en «héritage» à Merce Cunningham et à l’histoire même des danseurs, mais plusieurs extraits m’ont invité à quelques questions à propos de l’écart qu’un danseur crée nécessairement quant à l’imitation ici d’un mouvement d’oiseau – présent en temps réel d’ailleurs sur scène, dans des cages – comme toute photographie travaille aussi avec cet écart à l’égard de la mimésis (au-delà de la question de la ressemblance). Quel serait votre sentiment ici, en tant que danseuse face à cet écart évident entre l’image que crée un danseur «imitant» ou s’inspirant du mouvement de l’oiseau et le modèle qu’est l’oiseau lui-même. En fait, quelle est la place de cet écart dans la création chorégraphique?
Mathilde Monnier: L’écart est d’emblée en danse surtout que chaque corps crée un écart, une mimésis; même s’il veut être la copie conforme c’est impossible, il ne peut pas. Nous sommes habitués à travailler avec ces écarts et à les réduire et surtout à les traduire. Faire ou être l’oiseau est impossible pour un danseur. Donc nous ne travaillons pas à mimer le réel mais à le faire voir à le faire apparaître. À partir de cela les codes de la scène et les codes de la danse permettent de transférer ces mouvements et de faire croire que nous croyons .
La danse n’est pas le réel c’est le présent et l’espace .
Michelle Debat: Cette fois-ci, c’est dans votre chorégraphie Tempo 76 (97), que j’ai cru d’une part retrouver un travail autour de l’ombre et de la lumière, sur le nocturne comme il en est au cinéma ainsi que dans des photographies usant du mode cinématographique, et d’autre part travail renvoyant parfois à l’histoire de la photographie de groupe reprenant elle-même les codes de la peinture hollandaise dans le portrait de famille, par l’alignement sur 2 lignes, 2 rangs, de 5, 3 ou 2 danseurs. Pourrions-nous parler ici d’une transposition «anthropologique» de codes artistiques vers un autre? d’ un travail chorégraphique où les déplacements aussi furtifs soient-ils inventent des formes «survivantes» appartenant à d’autres champs de création, dont danse, cinéma, peinture et photographie? pourrions-nous y voir des significations proches?
Mathilde Monnier: Je n’ai pas pensé à la peinture quand j’ai fait Tempo, mais de fait il y a quelque chose sur la profondeur de champ dans cette pièce et sur le cadre, le champ et le hors champ. C’est une pièce cinématographique car tout se passe dans un cadre et en même temps toutes les lignes, alignements, regards se situent vers un hors champ très présent. C’est une pièce qui démultiplie la figure à l’infini, c’est-à-dire dans les coulisses comme si le fait d’être ensemble permettait la démultiplication. Il y a aussi un travail d’ombre et de lumière comme un paysage de nuit. J’ai regardé des photos de stades de nuit avec des éclairages très blancs et répartis par zone sur les pelouses. C’est un faux extérieur, une pelouse dans un théâtre, des faux animaux taupes qui bougent et une vraie herbe .
Michelle Debat: Dans le dossier de presse accompagnant votre chorégraphie Déroutes (2003), prenant appui sur un autre texte, celui de la nouvelle inachevée Lenz de Georg Büchner en 1835, vous disiez «À partir du matériau/Lenz, traiter ici d’un espace du ralentissement, pouvoir s’arrêter, dilater le temps, non pour développer une esthétique du mouvement au ralenti, mais pour donner un temps de décélération du regard et des perceptions en rupture avec les temps coupés, saccadés, séparés et ultras accélérés du monde». Est-ce que vous pourriez en tant que danseuse et chorégraphe ressentir cette impression de «décélération du regard et des perceptions», au vu de la photographie de Kertesz, dans cette traversée d’un carrefour dont on ne peut savoir qui oriente les trajectoires et les figures différentes des passants ou plus exactement des marcheurs? Pourquoi dans votre chorégraphie, il s’agit de danseurs, et dans la photographie de marcheurs? Est-ce que cette photo de Kertesz pourrait être une photographie de danse où les marcheurs seraient des danseurs ?
Mathilde Monnier: Dans la photographie de Kertesz comme dans beaucoup d’autres il serait facile d’y voir de la danse mais ce n’est pas de la danse c’est peut-être au mieux une chorégraphie mais c’est surtout notre regard contemporain qui y voit une chorégraphie, car au fond n’importe quel espace urbain traversé par des piétons (aéroport, gare, rue) devient le théâtre d’une chorégraphie possible. Il suffit pour cela de s’abstraire un peu et de regarder avec ce prisme là. C’est toujours fascinant car les gens ont leurs chemins et ils tracent sans se croiser d’une façon assez solitaire.
Michelle Debat: Dans le magnifique échange que vous avez eu avec Jean-Luc Nancy, la question du dehors et du dedans est un des seuils sensibles que vous privilégiez comme lieu de réflexion. Comment pourriez-vous le retrouver dans le travail que vous avez fait avec la photographe Isabelle Waternaux? Est-ce que la question de l’occupation du corps dans un espace donné est celle qui pourrait se retrouver posée et dans l’espace dansé et dans l’espace photographié? Devant les photographies d’Isabelle Waternaux, faites-vous une différence entre scène photographiée et scène dansée? Espace photographié et lieu du dansé?
Mathilde Monnier: L’expérience avec Isabelle Waternaux a été très courte et n’a eu lieu qu’une fois même si elle a donné le jour à plus de 50 photos sur 100 prises ce jour là . Je me suis mise en situation d’être photographiée et très consciente de cela sans confondre le plateau avec le studio photo. Mais ce qui est sûr c’est que je me suis aussi mise en situation de performance mais adaptée à la photographie. Cela a été une séance assez bizarre car c’était la première fois que je dansais nue mais j’avais déjà vu les photos d’ Isabelle et je savais aussi ce qu’ elle voulait. Pour moi cela a été clairement de faire un travail pour la photographe et de me concentrer là dessus uniquement pendant trois heures. Plus tard elle a décidé d’en faire un livre mais nous n’avons fait aucune autre prise. Je ne suis pas sûre que je l’aurais fait deux fois .
Michelle Debat: Avant que je ne lise le texte de Dominique Fourcade dans MW — où il reconnaît l’image de la mort, à la fois dans la célèbre photographie (mise en scène ou non) de Robert Capa (“Mort d’un milicien pendant une attaque près de Cerro Muriano, guerre d’Espagne”, 1938) et dans celle de la photographe Barbara Morgan composant avec Martha Graham en 1942, une chorégraphie sur le thème de la guerre, chorégraphie faite pour être photographiée à la demande du poète William Carlos Williams qui écrira à partir d’elle le poème War, the destroyer ! — je donnais l’année précédente un cours sur «photographie de danse, photographie de la danse» où j’avais proposé de «reconnaître» une même posture corporelle et chez le milicien de Capa, et chez Martha Graham, ouvrant la réflexion à la dimension anthropologique que l’on peut retrouver dans ces deux images photographiques, indexées comme images représentant la mort. Or rien n’est plus vain, que de vouloir reconnaître la mort là où il est impossible d’en fournir une image. En revanche, il m’a semblé évident mais aussi nécessaire de convoquer l’anthropologie pour essayer de tenter de penser photographie et danse autrement que dans l’illustration de l’une par l’autre, pour tenter précisément de réfléchir à partir de ces deux arts qui auraient en commun cette dimension théorique d’analyse pour pouvoir travailler ensemble ou se rencontrer au-delà de la simple utilisation de l’un pour l’autre. Est-ce qu’en tant que danseuse et chorégraphe il vous est arrivé de travailler à partir de postures, des gestes dits universels, ou d’inventer des mouvements, des «figures»…qui permettent de ne pas illustrer une chose précise mais de donner à «voir» et à penser l’irreprésentable commun à tous mais qui dit le vivant, la joie, la mort, la mélancolie, la souffrance…
Mathilde Monnier: C’est ce que je cherche tout le temps, trouver de l’universel dans le mouvement, pouvoir communiquer aux spectateurs une multitude infinie de déclinaison possible d’émotions. Ce qui est important est justement de ne pas le figurer mais de laisser apparaître et surtout de pouvoir refaire plusieurs fois la même chose, de retrouver les mêmes traductions dans le corps pour refaire à chaque fois ce qu’on a capté une fois. Le métier de la danse c’est beaucoup refaire, il faut apprendre à retrouver et à garder à conserver même si c’est à chaque fois différent, donc la plupart du temps on doit juste répéter et recommencer.
Michelle Debat: Pour continuer l’exploration non exhaustive de vos collaborations avec d’autres modes artistiques, venons-en si vous le voulez bien à l’une de vos dernières chorégraphies Soapera (2010) faite avec le peintre et scénographe Dominique Figarella. Dans le texte du programme vous nous dites vous être intéressé aux «processus inconscients liés au mouvement, comme l’élan, le jaillissement, l’éclat, l’explosion, l’énergie, la tâche» auxquels les matériaux utilisés par Dominique Figarella vous renvoyaient? Comment s’est passé votre collaboration avec le peintre Dominique Figarella? Etait-ce la question du geste de peindre et du geste du “danser” qui vous a réuni? Et qu’est-ce que cela a renouvelé dans votre propre manière de chorégraphier ou de danser?
Mathilde Monnier: Avec Dominique Figarella il ne s’est pas agi de se partager des rôles entre peindre et danser ni de trouver des correspondances entre musique et peinture mais de partager des questions communes comme la dramaturgie, la scène ,la boîte noire, la matière, la place de l’interprète. Dominique a un vrai sens du plateau et c’est souvent lui qui donnait des idées de mouvements aux danseurs et moi des idées de scénographies ou de rapports à la matière mousse. Nous inversions souvent les rôles mais sans que cela soit voulu parce que nous voulions être déplacé chacun dans un autre médium. Ce que j’ai appris de Dominique c’est surtout sa manière de penser la peinture et de réfléchir en permanence avec l’histoire de la peinture. C’est quelqu’un qui est toujours en train de vérifier des écarts de traduction des œuvres et qui travaille beaucoup sur l’écart que crée une œuvre quand elle est confrontée à une autre. Cela n’a pas modifié mon rapport à la chorégraphie mais cela l’a simplifié.
Michelle Debat: Est-ce que vous pourriez envisager de travailler dans ce même entrecroisement des gestes du dansé et des gestes du peindre, avec des gestes d’un photographe, — geste au sens du philosophe Wilém Flüsser lorsqu’il écrit «le sujet est la cause de la photographie et la signification de la peinture», faisant du geste du photographique «un geste de vision». Est-ce que donc vous pourriez envisager de travailler alors avec un photographe?
Mathilde Monnier: Je ne sais pas, cela dépend de qui? Pour moi la photographie, comme l’image mouvement est difficile à utiliser sur un plateau à côté de danseurs qui bougent; il faudrait que j’ai une idée ou qu’il y ait un enjeu fort. Bien sûr si je rencontrais Jeff Wall, j’aimerai bien travailler avec lui ou pour lui.
Michelle Debat: Pensez-vous enfin que la danse et la photographie sont à même de travailler ce feuilleté temporel d’où l’éphémère invente son épaisseur dans l’image que toutes les deux, aussi paradoxalement que cela puisse paraître, nous offrent du monde et de nos propres sensorialités? Danse et photographie ne seraient-elles pas toutes deux des arts du «sans sujet», de l’abstraction par excellence au sens philosophique et esthétique du terme?
Mathilde Monnier: La danse a un sujet, c’est elle-même
Propos recueillis entre décembre 2011 et janvier 2012.
Un très grand merci à Mathilde Monnier pour ce temps donné et cet échange attentif.
Entretien paru dans le dossier sur l’art: «Photographie & danse» (dir. M. Debat), revue Ligeia, n° 113-114-115-116, mai 2012, 280 p.
Avec l’aimable autorisation de Mathilde Monnier et de la revue Ligeia.