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Paris. Centre Pompidou: Le monde selon Michon… L’Arcardie

Par Jean-Pierre Salgas
Pierre Michon vient (au Centre Pompidou) quand il veut

Les Revues parlées du Centre Pompidou présentent à compter de cette semaine un nouveau cycle SELON… : un créateur est invité à donner le ton d’une série de soirées.  
L’écrivain Pierre Michon, qui a fait paraître lors de la dernière rentrée un recueil d’entretiens Le roi vient quand il veut, ouvre ce cycle par une série de 7 rendez-vous.

Pierre Michon : Le roi vient quand il veut. Propos sur la littérature
Albin Michel, 396 p. 22 euros.    

Né en 1945, originaire de Mourioux dans la Creuse, Pierre Michon «un écrivain qui n’écrit pas» ou peu, incarne depuis une petite vingtaine d’années  la figure du classique français vivant (promis — par la récente disparition de Julien Gracq — au statut de «statue du commandeur»).

Grâce aux Vies minuscules (1984) — une sorte d’autobiographie perpendiculaire —, que suivirent des portraits obliques de peintres (Van Gogh, Watteau, Goya) puis Rimbaud le fils puis quelques proses brèves… loin des avant-gardes et de leurs métamorphoses  (Sollers), loin des trois voies du nouveau d’alors (façon Jean Echenoz, Pascal Quignard ou Renaud Camus), loin aussi d’autres qui croient aux racines ou au peuple — des villes et des campagnes (et qui lui sont à tort souvent comparé : Pierre Bergounioux, Richard Millet, François Bon): «Je crois bien n’avoir plus d’autre racine que la lettre»,  déclare Pierre Michon.

Depuis une première étude de Jean-Pierre Richard dans L’État des choses, la littérature sur lui est immense (on en trouve dans ce volume la bibliographie  exhaustive). A mi-chemin de cette œuvre et de cette gloire, ce recueil réunit trente entretiens de 1989 (La Quinzaine littéraire) à 2007 (Le Magazine littéraire sur Julien Gracq justement). Le titre provient d’un commentaire de Velasquez (page 67)

«Vies minuscules est le dernier livre du XIXe siècle mais un pseudo-livre du XIXe écrit après les avant-gardes».
En 2006, l’auteur dit justement sa distorsion, son paradoxe, sa position singulière. Né à l’écriture entre Victor Hugo et le Flaubert de Salammbo (sa mère, l’école), Michon sait qu’il arrive après Dieu puis après le «sacre de l’écrivain» étudié par Paul Bénichou (Michon  significativement publié chez Gallimard grâce à Louis-René des Forets et Jean Grosjean).
Longtemps d’ailleurs, il travailla à «une grande machine» sur cette brisure absolue de l’Histoire, le Comité de Salut Public de 1793, Les Onze.
«J’ai beaucoup de mal à lire de la littérature complètement athée, de la littérature de notre temps  — non pas que je ne sois pas athée moi-même. Quoique…». C’est avec Claudel, Bernanos, Malraux, Giono… qu’il renoue. Lui-même raconte son entrée en écriture  comme une illumination, une conversion à trente-cinq  ans après un miraculeux Mai 68, et parle de son travail comme d’une liturgie.

Son sujet ? Dieu (l’infini) chez les hommes quelconques (Voragine et ses vies des saints, autant que le Foucault des Hommes infâmes, est le patron des Vies minuscules) et la littérature à la place de Dieu (ce qui lui évite, j’y insiste, restauration et régression : croyance) : «Je crois en Dieu quand j’écris»  (Melville selon Blanchot dit-il. «Dieu existe car il est le dédicataire de l’art»).
Ses «dieux» à lui, inlassablement commentés dans ce flot d’entretiens, sont Flaubert (la dévotion à l’écriture, l’écrivain de la jouissance féminine) et Faulkner (la Bible).
Même si un peu «Lagarde et Michon» parfois, Le Roi est un beau livre sur « l’homme précaire et la littérature ».

Pierre Michon
« Si j’ai bien compris ce que l’on me demandait, c’est autour de ce dont je ne doute pas, et qui dans cette mesure me tient à coeur, que je dois donner le ton de ces soirées. Or ce dont je ne doute pas, ce qui me tient à coeur, a beaucoup varié avec le temps et varie chaque jour. J’ai cependant élu quelques objets de savoir, de désir ou de nostalgie, qui ne varient pas. C’est d’abord mon goût des mythologies, du miraculeux ou du sacré, que j’appelle ici les dieux et l’Arcadie. C’est aussi mon appétit et mon écoeurement pour l’Histoire, que j’ai limitée à la rencontre sanglante de l’Ancien régime et de la Révolution. Enfin ce sont mes tocades littéraires pour les entreprises littéraires toquées, résumées ici par les deux expériences poétiques de Victor Hugo et de Rimbaud » .
 
« L’Arcadie existe en géographie : c’est une arrière campagne hirsute, peuplée de demeurés. C’est aussi la suave bergerie établie sur la méconnaissance ou la sublimation de ses disgrâces.
Nous parlerons dans cet écart, où se tiennent d’ordinaire les châmanes et les écrivains ». P. M.

Avec Pierre Bergounioux, Jean-Marc Besse (directeur de recherche au Cnrs, directeur de la rédaction de la revue Les Carnets du paysage), Jeanne Favret-Saada (directeur d’études à l’ Ecole pratique des hautes études).

Petite salle
entrée libre
19h30

Autres séances:

Mercredi 23 Janvier 2008

19:30       Le monde selon Michon… Les Menus plaisirs
Les Menus plaisirs est le titre du projet de film conçu en 1998 par Paul Vecchiali pour une adaptation filmique du texte de Pierre Michon.

Jeudi 24 Janvier 2008

20:00        Le monde selon Michon… Le règne de la terreur
« Le règne de la terreur, 1793 est indubitable, c’est le signe increvable de la modernité. C’est encore par le biais douteux du cinéma, par un film peu connu d’Anthony Mann, que nous y entrerons – et que malheureusement nous n’en sortirons pas ». P. M.

Mercredi 6 Février 2008

19:30        Le monde selon Michon… Soirée à Marine Terrace
« Je ne doute pas que les tables tournantes que Victor Hugo interrogeait à Jersey, ne soient un événement important de l’histoire littéraire, qui est une folie. Elles parleront d’elles-mêmes, nous les lirons sans les commenter ». P.M. Lecture par Pierre Michon et Denis Podalydès (sociétaire de la Comédie-Française).

Jeudi 7 Février 2008
19:30        Le monde selon Michon… Les fils de Rimbaud
« Qui doute de l’existence d’Arthur Rimbaud ? Qui ne l’aime pas ? Qui n’a pas peur de lui ? » P.M.

Mercredi 12 Mars 2008

19:30        Le monde selon Michon… au musée avec Bacon

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