Ana Jotta, Jiri Kovanda, Július Koller, Tamas St Auby, Hassan Sharif
Parallel Forms
Le point de départ de cette exposition est né d’une coïncidence: la simultanéité d’une exposition de Hassan Sharif avec un nouveau projet de Jiri Kovanda. Très vite, le rapprochement entre les performances produites par Hassan Sharif dans le désert de Hatta et les actions à Prague de Jiri Kovanda était clair; cette proximité des deux univers questionnait la manière dont l’art s’est développé simultanément à la périphérie et au centre, soulignant ainsi notre manière de voir et de légitimer un travail artistique.
Hassan Sharif et Jiri Kovanda
Si Hassan Sharif et Jiri Kovanda étaient conscients de certaines influences, leur contexte géopolitique a donné à leur travail toute sa singularité.
Souvent invisible et éphémère, l’œuvre existe d’abord sous forme de photographie document. Hassan Sharif et Jiri Kovanda commenceront à peu près en même temps un travail autour du banal et du quotidien et développeront une esthétique simple, avec des matériaux pauvres souvent trouvés.
Si la nécessité de produire des objets résulte chez Hassan Sharif et Jiri Kovanda d’une conscience de l’art conceptuel, cette nécessité est à l’inverse la matière première du travail conceptuel d’Ana Jotta.
Ana Jotta
Son rapport à l’art conceptuel s’affirme autrement, à travers une critique de la notion d’auteur et d’originalité. Elle revisite les styles comme pour effacer sa propre signature. Chez Ana Jotta, l’idée n’est cependant jamais autonome du processus de faire et sa pratique du «fait main» renvoie à cette ambiguïté décomplexée entre l’attachement à une pratique conceptuelle et la nécessité de produire des objets.
Tamas St Auby
Autres correspondances chez Tamas St Auby dans cette ambivalence entre l’affirmation de la suprématie de l’idée et la réalité de l’objet. Artiste proche de cet héritage duchampien, il considère l’art comme la manifestation d’une manière de vivre. Le poète et super-intendant Tamas St Auby brouille les pistes avec ses objets des années 70 à réactiver au présent.
Julius Koller
Julius Koller se situe aussi dans cet intervalle entre l’art et la vie lorsqu’il crée ses Conceptual Cultural Situation. Il produit un répertoire d’objets et de signes qui deviendront le point de départ de ses «anti-performances», déployant son champ d’action dans la vraie vie.
Au-delà des rapprochements formels ou artistiques, cette exposition tente de présenter la manière dont ces cinq artistes continuent à résister à leurs contextes, à leurs codes et règles. Leur travail singulier et libre témoigne de cet héritage conceptuel comme si celui-ci avait d’abord été un outil d’émancipation ramenant l’échelle de travail à celle du corps; une économie de moyens qui privilégie l’individu sur le discours et permet de redessiner la frontière entre l’espace public et la sphère privée. Avec presque rien, chacun peut dès lors, depuis son balcon à Bratislava, son atelier à Dubaï ou sa maison musée à Lisbonne, inventer et transformer imperceptiblement la réalité.