Paul P nous offre des dessins et des aquarelles où le désir semble effleurer à chaque coup de crayon ou de pinceau. Dans ses aquarelles, les personnages sont comme enfouis dans des paysages qui les dévorent et les font exister, ils sont captés dans leur nudité, et leur fraîcheur.
Paul P renouvelle le romantisme d’un Caspar David Friedrich en croquant des jeunes hommes en fleur. Il défie l’art du paysage et la représentation de la nature par des poses floues et des délicatesses subites.
Certains dessins au crayon graphite, sans doute les plus évocateurs, dévoilent des amants qui s’embrassent. La force de ces dessins réside dans la suspension de l’instant où les lèvres de ces garçons vont se toucher lors du baiser : les lèvres s’approchent et se frôlent créant une scène où le désir prend forme. C’est l’instant douloureux et magique de réalisation du désir qui importe ici. Paul P donne à voir l’essence de l’érotisme, le moment où tout peut encore se passer.
L’androgynie des corps n’est pas une simple confusion des genres, mais avant tout la preuve d’une éternelle jeunesse et surtout un gage de pudeur. Ces silhouettes et ces visages ont la grâce des anges. A bien des égards, la manière avec laquelle Paul P dessine est cinématographique : il crée des plans et on sent bien que ces images sont prises à un moment qui a un avant et un après. Cette exposition évoque certains plans des films de Gus Van Sant, notamment Last Days où l’acteur Michael Pitt incarne, à l’écran, les visages de Paul P : un visage d’homme mélancolique, des cheveux mi-longs, les paupières baissées, une androgynie éthérée.
Comme chez Gus Van Sant, la fraîcheur de cette beauté ne va pas sans le voile noir de la mort. On sent planer quelque chose d’indéfinissable dans ces dessins. Le titre de l’exposition n’est il pas : «Par temps gris» ? Et que se passe-t-il, par temps gris, au mieux un laissé allé romantique à la délectation morose, au pire, une envie de suicide… Quelque part, dans des chambres et des intérieurs sombres, des corps glissent, s’emparent de chaque seconde, entourés d’une petite musique de mort.
Paul P.
— Untitled, 2007. Oil on paper. 24 x 16 cm
— Untitled, 2007. Watercolour on paper. 26 x 17 cm
— Untitled, 2007. Watercolour on paper. 17 x 12 cm
— Untitled, 2007. Oil on paper. 24 x 16 cm
— Untitled, 2007. Graphite on paper. 29 x 23 cm
— Untitled, 2007. Graphite on paper. 36 x 43 cm
— Untitled, 2007. Oil on paper. 15 x 24 cm
— Untitled, 2007. Watercolour on paper. 19 x 16 cm