Abdelkader Benchamma, Marcel Broodthaers, Armelle Caron, Gérard Collin-Thiébaut, Jean Dupuy, Daniel Firman, Hervé Graumann, Agnès Fornells, Elisabeth Krotoff, Yvan Le Bozec, Le Gentil Garçon, Bruce Nauman, Patrick Saytour
Panurge dit tout et n’entend rien!
Dans les livres de Rabelais, l’ordre d’un langage fondé en harmonie naturelle et divine est mis à rude épreuve : qu’il soit oral ou écrit, ses ambiguïtés, ses limites, ses conventions, mais aussi sa « plasticité » et les multiples jeux qu’il permet, – en somme tout son arbitraire – en font l’objet des plus extrêmes excès que la littérature ait jamais envisagés.
Panurge, personnage aux multiples visages contradictoires et simultanés, est le héros rabelaisien qui invente le plus dans ce registre : s’il a peur de tout (et surtout d’être « cocu »), il n’a pas peur d’organiser les signes et les mots comme cela l’arrange, c’est-à -dire selon ce que lui dictent ses intérêts bien compris et sa « mauvaise foi » évidente. À en rendre vert de rage Frère Jean, il dit tout et de toutes les manières (langues réelles ou inventées, gestes, contrepèteries, néologismes aberrants, onomatopées, etc.) exprimant ainsi l’être multiforme et (in-)signifiant qui caractérise sa finitude.
Seul le mot de la Dive Bouteille (« Trinch ! » « bois ») lui entre par l’oreille gauche, mais est-on sûr qu’il ait vraiment entendu qu’il sera, quoiqu’il en soit et comme tout un chacun, « trompé, battu, volé » ?