Depuis longtemps Xavier Veilhan dresse un bestiaire impressionnant. Son rhinocéros rouge Ferrari, son lion ou son requin Furtivo étaient des hommages à l’histoire de l’art et à notre époque moderne. Autant designer que tôlier, ses sculptures ont à voir avec la carrosserie de formule 1, ou avec l’aspect des avions furtifs invisibles au radar, mais aussi avec les gravures d’un Dürer ou les chronophotographies de Marey.
Ici la liste s’allonge. Un nouveau venu monte dans l’Arche de Xavier. Gorilla, Gorilla, Gorilla est un grand singe rencontré au zoo de Budapest lors d’une visite familiale. L’artiste avait été frappé par le regard du gorille. Initialement, l’exposition aurait du s’intituler «Gorilla», mais le rendu de l’expression du grand chimpanzé n’était pas satisfaisant.
La Turbine pousse également les investigations précédentes de Xavier Veilhan. Intéressé par les moyens de locomotion comme les vélos, la Ford T, les zodiacs, les carrosses, cette machinerie noire collée au plafond ressemble à une conduite d’aération et aux pales d’un réacteur d’Airbus. Il était question qu’elle tourne avant l’exposition, mais malheureusement on ne peut la découvrir qu’endormie.
La pièce en carbone reprend en volume les facettes qu’aime tant Xavier Veilhan. De formes triangulaires, les hélices forment un camembert noir fuligineux. L’aspect rouille-charbon est pourtant à l’opposé des matériaux déployés que sont le carbone et le métal. Occupant toute la surface du plafond, c’est une des pièces les plus impressionnantes d’«Orchestra».
Pour trouver de la mobilité et du cinétisme il faut s’approcher du Mobile n°4. On se souvient de celui installé à Beaubourg et de celui du château de Versailles. Ici le changement est de taille car les boules d’origines ont été remplacées par des baguettes noires horizontales. Tenues en laisse par un fil vertical, l’harpe éolienne s’anime au moindre coup de vent. Seul un contrepoids vertical vient s’opposer à ces lignes d’horizons.
Pendule dripping ressemble un peu à celle qu’utilise le professeur Tournesol dans les Sept boules de cristal, à la différence près que le trésor qu’il découvre n’est pas celui du temple du soleil. Comme une toupie accrochée à un fil d’ariane vertical, une spirale est tracée sur le sol du Grand Palais.
Le Monument rejoue ce que fait Xavier Veilhan depuis longtemps en collaboration avec des groupes de musique. Une plateforme rouge accueille deux sculptures et des fleurs. Pareil à une scène, cette plage est une invitation à se détendre.
Au contraire, Furtivo Marine est une sculpture qui renoue avec des formes qui abandonnent le voxel. La sculpture devient plus reconnaissable, elle ne se cache plus derrière des facettes triangulaires. Alice est aussi dans la même veine. Elle a beau avoir la même couleur que Sophie, exposée en permanence au café Germain, un jaune monochrome, elle revient à la statuaire traditionnelle.
A travers ces quelques exemples on comprendra que Xavier Veilhan poursuit son chemin et en cherche de nouveaux. L’exposition est pour lui un lieu et un temps de création. Sans se mettre à nu il arrive à se mettre en danger. Même si l’espace n’est pas tout le temps dominé, il est à chaque fois investi de la patte de l’artiste.
Å’uvres
— Xavier Veilhan, Alice, 2011. Bronze, peinture polyuréthane. 155 x 71 x 114 cm
— Xavier Veilhan, Le Monument , 2011. Polyuréthane, bois, acier, peinture, zinc, skaï, fleurs coupées, branchages. 225 x 815 x 540 cm
— Xavier Veilhan, Les Rayons, 2011. Elastiques, acier. Dimensions variables
— Xavier Veilhan, Marine, 2011. Bronze, acier, peinture polyuréthane. 286 x 100 x 78 cm