A l’image des artistes jadis regroupés sous l’acronyme BMPT, Nathan Hylden développe un langage formel révélé dans la répétition d’un motif. A première vue ses peintures semblent évidentes mais il faut les appréhender dans leur ensemble: l’artiste empile les plaques d’aluminium, d’abord sérigraphiées puis vaporisées de peinture en spray.
De larges bandes blanches se forment et suivent la logique de l’empilement. Chaque œuvre se retrouve alors impliquée dans le processus de production de la suivante, elle en est sa continuité selon le principe de la boucle. Cette méthode sérielle, autonome et autoréférentielle repense la finalité de la peinture en termes formels et matériels.
Les œuvres se dressent inachevées en nous laissant apercevoir le secret de leur fabrication à travers les traces du pinceau, les dégoulinements du spray. Le caractère de «work in progress» pourrait convenir à cette exposition ne serait-ce que pour les matériaux industriels utilisés, propres à l’esthétique du chantier et des peintres en bâtiment. La question inhérente à toute création artistique se pose alors avec force: toute œuvre n’est-elle pas vouée à l’inachèvement, à l’échec? Toute œuvre n’est-elle pas destinée à rester suspendue dans un hors-temps de la création ?
Le temps s’est immiscé entre les différentes couches alternées: la production est différée dans le temps. Mises bout à bout, les œuvres se liraient comme une partition rythmant la création. Le procédé sériel produit des œuvres uniques et introduit la temporalité dans l’œuvre où chaque image devient le début et le résultat de l’ensemble des autres.
Dans cette même logique, la base de chaque peinture de Nathan Hylden est une image sérigraphiée d’une de ses propres toiles. Ainsi, l’artiste n’est jamais face à une toile vierge mais face à une toile saturée d’Histoire. Ses œuvres invoquent tous les tableaux du passé. Comme le dit Deleuze dans Logique de la Sensation, la toile vierge est en réalité pleine de toutes les peintures déjà peintes. Nathan Hylden «peint sur des images déjà là ».
En empruntant ses matériaux au monde du chantier et de la construction, en utilisant une technique sérielle qui se rapproche plus de l’industrialisation que de la création artistique, Nathan Hylden présente un travail métallique toujours «under construction». Une œuvre cyclique et cumulative, sans début ni fin, qui porte la trace discrète de son ensemble.
Liste des œuvres
— Nathan Hylden, Untitled, 2010. Acrylique sur aluminium.197 x 145 cm (6 œuvres)
— Nathan Hylden, Untitled, 2010. Acrylique sur lin. 74 x 58,5 cm (4 œuvres)