Cette page a été un peu chahutées en passant de l’ancien au nouveau site, les corrections sont en cours.  
Non classé

On n’y voit rien

15 Mai - 14 Juin 2008
Vernissage le 15 Mai 2008

Chez Vanessa Fanuele, les couleurs éthérées et coulantes, presque coagulantes traitent de la fluidité des corps, qui parfois mêle l’eau et le sang. Les corps vaporeux - vapeurs noires et rouges - établissent un rapport direct avec la mort, qu’on recouvre d’un voile comme d’un linceul.  

Communiqué de presse
Vanessa Fanuele
On n’y voit rien

Organes et joyaux

« [Les objets surréalistes] ressemblent à telle circonstance future, merveilleuse et insolite, emplie d’intellectualité, de luxure, de lenteur et de noblesse, nullement impossible, proche au contraire d’éclore à tout instant, comme par exemple de jouer une partie d’échecs contre une très belle femme sur un échiquier précieux. » Roger Caillois, « Le décor surréaliste de la vie » (Documents 33, n°2, 1033°)

La féminité peut-être effrayante. Lorsque les organes génitaux se confondent avec de la joaillerie, lorsque les fluides du corps mêlent l’eau et le sang, lorsque le corps se transfigure en un être mortuaire ou glorieux —, alors on éprouve tour à tour fascination et effarement. Dans l’oeuvre de Vanessa Fanuele, la mort est parée, comme elle l’est dans les catacombes de Naples, où les squelettes sont mis en scène entourés de dorures baroques.

Ici, telle une Vierge des Douleurs, une femme en deuil est masquée par un voile ouvragé en une dentelle organique. Disposée en retable, l’oeuvre, de près, révèle les images d’objets — coeurs encore palpitants, fruits coupés — qui s’échappent de leur contenant. Ce sont les souvenirs enfouis et les émotions violentes qui débordent, venant former une guirlande précieuse. Ailleurs, un grand lustre, au lieu de laisser resplendir la lumière, l’absorbe dans les boîtes noires qui le forment. En guise de rayons, de sombres perles s’en échappent, étouffant leur contenant. C’est un lustre nocturne, qui n’abolit pas les cauchemars mais en favorise l’éclosion.

Certains des dessins et des installations de Vanessa Fanuele observent un mouvement de chute. Ce sont de petits objets retenus dans des filets, reliques soumises aux lois de la gravitation et de la disparition, mais retenues dans les airs le temps qu’on déchiffre ces menues dépouilles. Ce sont aussi les astres qui s’égouttent du corps d’une femme flottant dans l’espace, caillots de sang noirs et lumineux. Ce sont les filaments translucides qui s’épanchent des blessures. Souvent, les pleurs sont des perles. Ils tombent en cataracte comme la chevelure abondante d’une Marie-Madeleine ou la pluie d’or d’une Danaé.

Mais, dans d’autres oeuvres, les objets se réveillent sous les voiles qui les recouvrent. Au terme d’une longue descente au fond d’elle-même, l’artiste-archéologue (ou pêcheur sous-marin) les restitue au monde réel. Bucranes, faces-à-main, gants de femme, organes et colliers, masques et mâchoires : ces épaves gisant depuis longtemps au fond de la conscience comment doucement à émerger.

« Oh les pierres précieuses s’enfouissant, et les fleurs ouvertes !  » écrit Rimbaud : les oeuvres de Vanessa Fanuele offrent la même promesse et la même menace. Elles se tiennent en effet entre la suspension et la chute, l’enfouissement et l’éveil, les tréfonds et la lumière, l’effroi et la fascination. « Et la Reine, la Sorcière qui allume sa braise dans le pot de terre, ne voudra jamais nous raconter ce qu’elle sait, et que nous ignorons » (A. Rimbaud, « Après le déluge », « Illuminations »). 

AUTRES EVENEMENTS Non classé