ART | EXPO

Olivier Alibert

02 Mar - 27 Mar 2004

Des peintures dessinées aux couleurs évanescentes. Un monde vaporeux et fragile situé hors de tout temps et de tout espace. Une inspiration provenant du monde du marketing, absorbée et retranscrite, tel un conte.

Olivier Alibert

Les tableaux d’Olivier Alibert nous donnent à voir des images ou des objets qui fonctionnent comme des archipels de signes dispersés à la surface du tableau.
S’il fait de la peinture son moyen d’expression privilégié, il trouve ses sources dans les milliers d’images imprimées qui déclinent les objets de la société de consommation et forment ce monde artificiel «plus vrai que nature». Ces catalogues de vente par correspondance ou de promotions des grandes surfaces, où l’image se substitue au réel et où objets, produits et autres substituts de nature prolifèrent jusqu’à devenir un monde en soi quasi abstrait, sont la matière première d’Alibert qui en consulte et en collecte des quantités très importantes. Dans cette masse impressionnante, il va en sélectionner un petit nombre pour disposer à la surface du tableau des suites sans histoire et des histoires qui auraient perdu leur fil.

La peinture est ici le lieu où s’abîment les récits qui devraient s’y configurer. Surnagent des fragments, blocs d’images, d’objets et de signes qui errent, parfois se superposent et se croisent en des rencontres aussi improbables qu’impératives.
Comme pas mal d’artistes du pop art et de la figuration narrative , Alibert part non seulement du réel mais de son absorption par l’image reproductible; il part de la prolifération des images et des signes et de leurs potentialités signifiantes et narratives. En ce sens on peut évoquer à son propos des oeuvres comme celles de Fahlström ou de Baruchello; Mais le récit et la temporalité qu’elles impliquent sont ici disloqués, éparpillés dans le blanc du tableau qui devient un territoire de la dérive des signes et des images.

Olivier Alibert provoque leur errance et en ébranle la stabilité. Ils les rend à un statut précaire de matrices signifiantes mais flottantes qui, (en faisant une comparaison un peu osée) seraient aux images ce que les «impulse» de Merce Cunningham produisaient avec le vocabulaire chorégraphique du ballet classique. Il procède par associations libres, déplacements, superpositions qui évoquent les mécanismes du rêve, de la réminiscence et des jeux d’entrecroisement entre signifiés et signifiants pluriels. Mais avec un imaginaire qui a perdu la naïveté et le merveilleux enfantins. C’est cette fragilité des images en perdition dans les territoires de la représentation que peint O.Alibert. La fonction mimétique de l’image est corrodée par la dissociation de sa structure.

Nous sommes confrontés à une dérive en catimini d’images légères comme un souvenir qui s’étiole ou fait retour trop brièvement pour livrer clairement sa signification. Leur position incertaine, flottante, produit sur leurs relations réciproques l’effet inverse de celui qu’on serait en droit d’attendre. Contre l’évidence des choses, contre les histoires et les images trop simples pour être honnêtes, Olivier Alibert prend en douceur le parti de l’aphasie visuelle du démembrement poétique de l’image et de ses « histoires ». Dans ce doux naufrage, les signes et les images sont en perdition progressive dans l’océan de la peinture. Ne persistent à la surface que quelques images, quelques signes épars et quelques trophées en déroute dans le blanc du tableau. Ils nous font encore des signes, s’adressent à nous vainement. Ils sont les échos sans voix d’un récit perdu.»

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