L’exposition « Envisagées » à la Maison Européenne de la Photographie présente le travail qu’Olivia Gay consacre au monde du travail et aux femmes, à travers une photographie documentaire créative à la dimension picturale.
« Envisagées » : les femmes vues par Olivia Gay
L’exposition revient sur la carrière photographique d’Olivia Gay, portée par l’exploration conjointe du travail et de figures féminines qui sont montrées comme des résistantes, par leur seule opiniâtreté à exister et à persévérer. Les photographies d’Olivia Gay sont traversées par un questionnement sur la possibilité de redonner du sens au travail dans une société qui le fragmente et le nie en tant qu’œuvre à part entière, et sur la possibilité de redonner de la dignité à des femmes ignorées et déconsidérées par cette même société.
La pratique photographique d’Olivia Gay s’oppose au photoreportage et à l’image journalistique : elle préfère à l’instant décisif, au pathos et au choc des images, une démarche patiente qui repose sur la quête d’un regard. Dans une forme de documentaire créatif, Olivia Gay mène chacune de ses séries dans la durée, chacune d’elles se construisant sur sept années, et assied ses clichés sur un lien lentement créé avec ceux qu’elle photographie.
Olivia Gay redonne un visage aux femmes laissées pour compte
Il en résulte des images à la qualité picturale qui plongent profondément dans des mondes et des intimités particulières. La photographie intitulée Yuleisy, réalisée en 1997, appartient à une série qu’Olivia Gay a consacrée aux prostituées cubaines, dont elle restitue la vie quotidienne, la force et la liberté, défiant l’image traditionnellement posée sur elles. A travers ses portraits, la photographe offre une visibilité à celles qui sont oubliées de la société comme de l’art contemporain : ouvrières à la chaîne, caissières de supermarché, empaqueteuses, détenues, domestiques brésiliennes, dentellières, moniales ou réfugiées…
Le titre de l’exposition, « Envisagées », résume la démarche d’Olivia Gay qui pratique ce que Levinas nommait un « envisagement » et qui consiste à proposer un portrait subjectivé des personnes qu’elle rencontre. Qu’il s’agisse de la femme photographiée de dos, comme perdue dans Rio de Janeiro avec Domestica, de la dominicaine du Monastère Saint-Maximin de La Prière ou de Lili, détenue de la maison d’arrêt de Caen, toutes ces femmes anonymes retrouvent un visage à travers l’objectif d’Olivia Gay