Au centre de l’Atelier Cardenas Bellanger, l’artiste américain Kyle Field a posé une sculpture. Les paradis des neiges perdues sont poétiques. Dans des teintes pastel vues à travers un miroir, on entre dans son univers par ce Cotton Ball Hill qui appose la légèreté des bouchons de liège et l’apesanteur de personnages-poupées à une poésie lacérée. La miniaturisation minutieuse semble tenir contre les vents du monde par le biais de pinces à linge.
Autour, quatre dessins et une photo reflètent les mille visages de cette nature douce-amère. Sur du papier granuleux et épais dont on voit la déchirure, Kyle Field a brossé deux dessins en couleurs et deux en noir et blanc.
Les traits de crayon et d’encre de chine s’entrelacent et se confondent sans violence dans une forme géométrique et néanmoins toute en courbes et en souplesse. Parfois une tache d’encre vient griffer cette harmonie.
Ces œuvres sont autant d’étendards qui recouvrent l’œil comme des gazes et le laissent fouiller leur cristal spirituel. Mystérieuse alchimie de traits, et sabbat de nuances. C’est chez Paul Klee et chez l’artiste underground américaine Joy di Feo que Kyle Field est allé chercher cette magie de l’apaisement par le dessin.
En face, la photo Hobo Jungle présente naïvement comme une flore et faune équatoriale du Douanier-Rousseau un paysage finalement bien plus urbain et délabré qu’on ne l’aperçoit à première vue.
Du coup l’on retourne à la petite musique des dessins pour y découvrir plus de violence qu’on en avait trouvée au premier regard. Dans l’arrière-salle, les dessins supplémentaires que Kyle Field a accrochés au mur font le lien entre le cristal, le dessin et la musique.
Fasciné par les symboles que l’artiste a emmêlés dans les fils d’un paysage qu’on croirait plutôt plat et japonisant, le visiteur y voit des mantras aux références antiques nombreuses. Ils prennent lentement tout leur relief et l’on se met à les lire comme des partitions ésotériques. Cet exercice spirituel dans le coton cristallin de l’art est à la fois source de repos rêveur et d’intranquillité active.
Kyle Field
— Honeycone thinderberd, 2006. Watercolor on paper. 6 .6″ x 7 1/2″ / 17 cm x 19 cm
— Walter ’s wand, 2006. Watercolor on paper. 9.6″ x 8.5″ / 24.8 cm x 21.7 cm
— Cloud Burst Fountain towards, 2004. Watercolor on paper. 7.8″ x 9.4″ / 20 cm x 24 cm
— Automn of delay, 2006. Ink on paper. 8″ x 9.5″ / 20.3 cm x 24 cm Â
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