Paul Pagk
Œuvres récentes
«Il n’y a aucun critère reconnu de ce qui est une couleur, si ce n’est que c’est une de nos couleurs» écrit Wittgenstein dans ses Remarques sur la couleur. Au travers de trois grandes toiles évoquant des monochromes: bleue (High Tide), jaune (The Meetin’), rose (Once above once below), Paul Pagk questionne notre perception de la couleur. Tandis que pour Rodchenko le tableau monochrome aboutit à une idée finale de la peinture, il n’est ici que le début de l’abstraction.
Quelle couleur imagine‐t-on si l’on nous demande d’imaginer le jaune? Une couleur subjective, fluctuant d’un individu à l’autre, d’un instant à l’autre. Le pigment jaune de The Meetin’, renvoyé de tableau en tableau, accroche le regard: sur la toile naissent des fluctuations vertes, rosées, sous l’effet du temps et de l’observation.
La ligne répond à la couleur: parfois née de la couleur ou de son absence dans un renversement des normes entre le fond et la forme (Untitled Yellow and White), parfois s’affirmant en tant que dessin notamment au fusain (Untitled, 2013). Dans High Tide, une ligne faisant allusion à la perspective crée une sensation de volume qui résonne avec la profondeur du pigment bleu. Un système complexe d’échos et de rappels se crée entre les toiles: les couleurs et les formes se répondent, tels les motifs de Once above once below et d’Untitled Yellow Pink White. L’image devient familière au travers de formes rappelant les objets quotidiens (White gray and yellow). Mais au‐delà de l’image, c’est l’idée de l’image que Paul Pagk décrit, comme en témoigne la bande jaune qui barre l’objet géométrique d’OGLS 128.
De dimensions humaines, les tableaux revendiquent leur matérialité par le dialogue qu’ils créent avec le corps de celui qui regarde. Les formes se soumettent aussi aux lois de la gravité terrestre. Dans un rapport phénoménologique, le tableau est révélé par le temps de l’observation car, de même que le passé et le futur sont vécus au présent, «la peinture doit changer le présent» dit l’artiste.
Temporalité de la contemplation qui fait elle-même écho à la temporalité de la création. Dans son atelier new‐yorkais, Paul Pagk construit ses tableaux sur des périodes longues s’étirant sur des mois, parfois des années (il lui faudra plus d’un an pour terminer High Tide), dans un processus de recherche qui devient histoire apparente sur la toile.