Anne Pesce
Nous disons que j’imagine
A la question: « Où est la nature dans votre oeuvre ? »
Pollock répondait: « Je suis la nature… »
Anne Pesce s’inscrit dans la trame empirique de son aîné.
Exploratrice du réel, partie à la rencontre d’espaces lointains (Groenland, Islande…) pour capter la phénoménologie d’une nature affranchie de ses références historiques, sa démarche picturale se résume en quatre mots : faire l’expérience du monde.
C’est la parole d’Ismaël répondant au Capitaine Achab dans Moby Dick – « Et bien Monsieur, je veux en faire l’expérience, voir un peu ce que c’est, je veux voir le monde » – c’est le regard de Cézanne qui « rêve » de la compréhension de la nature du point de vue du tableau et qui pour cela n’a de cesse que de la regarder…
Quittant Paris pour s’installer à Vence en 1992, lieu de vie choisi d’où elle peindra de jour et de nuit « la mer sur la terre », sa conscience de l’étendue s’incarne à travers dessins, peintures, films, comme un processus de transposition de l’image vécue, expérimentée, prolongée dans sa masse colorée jusqu’à la théorie picturale.
La minéralité d’une montagne enneigée, la fugacité d’un ciel après l’orage, la transformation d’un site par les ouvriers d’un barrage, se voient ainsi restitués dans des modes plastiques où chaque tâche, trace et touche picturale s’agencent et font sens dans leur différence.
Dans sa traversée du visible et son assiduité à percevoir « le général du particulier», Anne Pesce exprime néanmoins sa foi en la fiction comme projet d’atteindre le réel…
La fragilité du processus porte bien son titre : « Nous disons que j’imagine… »