ART | EXPO

Nothing, nothing!

10 Oct - 19 Déc 2010
Vernissage le 09 Oct 2010

En 2007, Kerstin Brätsch fonde avec Adele Röder le collectif DAS INSTITUT. Cette parodie d’une société d’import-export pose la question de l’autorité de l’art à l’ère de la globalisation en intégrant les codes du marketing et de la publicité.

Kerstin Brätsch & DAS INSTITUT
Nothing, nothing!

Du 10 octobre au 19 décembre, le Parc Saint léger invite Kerstin Brätsch et son collectif DAS INSTITUT à investir les locaux de son ancienne station thermale. Cette exposition représente sa première grande exposition personnelle dans une institution française.

Si la peinture constitue le socle de la pratique de Kerstin Brätsch, son travail intègre et fusionne néanmoins une grande variété de médiums et se déploie tout à la fois dans une pratique personnelle et collective.

En 2007, elle fonde avec Adele Röder le collectif DAS INSTITUT. Cette parodie d’une société d’import-export pose avec un humour féroce la question de l’autorité de l’art à l’ère de la globalisation et de la reproductibilité infinie des images, en intégrant dans le travail de peinture les codes du marketing et de la publicité.

Chacune des composantes de son oeuvre, peintures, posters, photos, fanzines, performances, enrichit une oeuvre profondément singulière, transgressive et féministe.

Mais revenons sur ce qui frappe de prime abord dans le travail, la peinture. Une peinture tout en vibration et en oscillation, qui exulte le désir et la jubilation, une peinture hallucinatoire qui galvanise et vampirise.

Puis le regard dérive, s’échappe et s’attarde sur des posters aux couleurs criardes, témoins oculaires d’un monde devenu marchandise.

L’entreprise de sabotage se révèle alors: les posters sont des cartels publicitaires des peintures et les peintures des répliques d’images générées par ordinateur. Ici des répliques, là des décors pouvant servir pour une performance, ailleurs encore un socle sur lequel se déploie des fanzines publicitaires.

La peinture est littéralement mise à terre, puis remise en circulation, reproduite et répliquée. Peinture réplicante bien plus que réplique d’ailleurs –à l’image de ces personnages de Blade Runner, génétiquement créés pour être des doubles parfaits des humains et qui se révoltent contre cette domination qui fige leur identité.

Le travail joue avec malice de cette ambivalence de l’autonomie de l’oeuvre d’art à l’épreuve d’une société mercantile. L’industrie culturelle a d’ailleurs elle-même largement pillé le répertoire formel des artistes depuis les années 1960, du minimalisme au pop en passant par l’abstraction, tout un vocabulaire formel et politique passé à la moulinette des publicitaires, designers et autres stylistes.

Pour sa présentation à Art Basel en 2010, Kerstin Brätsch a présenté ses peintures derrière des cloisons de plexiglas colorés, leur utilisation fonctionnant comme des écrans de fumée: sommes- nous face à un Liam Gillick ou dans la dernière boutique à la mode ?

Le titre de l’exposition de Kerstin Brätsch & DAS INSTITUT pour le Parc Saint Léger fait référence à un texte de Georges Didi Hubermann analysant une nouvelle de Balzac, Le Chef d’oeuvre inconnu. La nouvelle de Balzac nous relate la rencontre entre un peintre et deux de ses condisciples, le peintre les ayant conviés à commenter sa dernière toile.

Mais la sentence des deux artistes tombe, implacable «Mais il n’y a rien sur cette toile !?», alors le peintre incrédule, répète «Rien! Rien!». Le lendemain, désespéré, le peintre se tue après avoir mis le feu à son atelier.

Cette mise à mort que le titre de l’exposition suggère ne doit pas égarer le visiteur, c’est à l’avènement d’une peinture mutante que Brätsch aspire, véritable pied-de-nez au passage au paternalisme et à l’héroïsme viril d’une peinture allemande omniprésente sur le marché de l’art. Peinture mutante voire queer, tant le parallèle avec Judith Butler et les théories des Gender Studies semble ici pertinent.

Pas de mise à mort donc mais bel et bien une subversion de la peinture au sens où Butler l’évoquait. Une peinture à l’identité
mutante et provisoire, qui assimile, travestit et se joue des nouveaux circuits de production et de diffusion des images.

L’exposition au Parc Saint Léger présente plusieurs séries, réalisées en solo ou en duo avec DAS INSTITUT, dont certaines sont produites pour l’occasion. Le premier catalogue de l’artiste et de son collectif verra le jour courant 2011, fruit d’une collaboration entre le Parc Saint Léger, la Kunstverein de Cologne et la Kunsthalle de Zurich.

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