Mathilde Monnier et Loïc Touzé présentent Nos images, une pièce pour deux danseurs sur un texte de Tanguy Viel.
En France, pour bien écrire sur le cinéma il faut avoir une certaine distance.
Il faut avoir la tête froide. D’autant que, j’ai remarqué, on échoue à peu près toujours à parler de ce qu’on aime.
«On échoue toujours à parler de ce qu’on aime» est une citation de Roland Barthes, mais c’est aussi une précaution qu’on peut prendre pour s’excuser par avance de ce qu’on va dire. Même s’il ne faudrait jamais s’excuser de rien dans la vie, parce que c’est un signe de faiblesse.
«Never apologize, it’s a sign of weakness», comme disait John Wayne dans je ne sais plus quel western, en bon capitaine de la cavalerie américaine. Mais moi ça m’est resté comme une devise, inapplicable, certes, mais une devise quand même «never apologize, it’s a sign of weakness», ce qui est particulièrement vrai dans la critique de cinéma, quand on aspire à la critique de cinéma, qui est un monde très exigeant, un monde où il faut savoir s’imposer, si je puis dire, avec virilité. C’est un autre point qu’il faudrait développer, la virilité à l’oeuvre dans la critique de cinéma. Il y a beaucoup de cow-boys dans la critique de cinéma, beaucoup de petits John Wayne sans bien sûr l’envergure véritable de John Wayne mais disons, des allures de John Wayne. Les critiques de cinéma sont les cow-boys de la pensée. Je les imagine toujours descendre de cheval avec les jambes arquées, et entrer dans les salles de rédaction comme on entre dans un saloon, la main à la ceinture, prêts à dégainer sur tel ou tel film. Sauf qu’au lieu d’un revolver ils ont des phrases plein la bouche.
Tanguy Viel — extrait du spectacle
Chorégraphie et interprétation: Mathilde Monnier et Loïc Touzé
Textes et interprétation: Tanguy Viel
Collaboration artistique: Annie Tolleter
Costumes: Laurence Alquier
Lumière: Eric Wurtz
Réalisation sonore: Antonin Clair
Coproduction centre chorégraphique national de montpellier languedoc-roussillon
1ère version du spectacle créée au triangle, scène conventionnée danse – rennes, dans le cadre du festival agitato 09
Mathilde Monnier
Mathilde Monnier occupe une place de référence dans le paysage de la danse contemporaine française et internationale. De pièce en pièce, elle déjoue les attentes en présentant un travail en constant renouvellement. Sa nomination à la tête du Centre chorégraphique de Montpellier Languedoc-Roussillon en 1994 marque le début d’une série de collaborations avec des personnalités venant de divers champs artistiques.
De la plasticienne Beverly Semmes au philosophe Jean-Luc Nancy en passant par la cinéaste Claire Denis, Mathilde Monnier ne cesse de repousser les frontières pour nourrir un travail qui est expérience avant toute chose. Elle sait aussi s’entourer d’une équipe de création fidèle composée notamment du concepteur lumière Eric Wurtz et de la scénographe Annie Tolleter. La musique occupe une place de choix à travers des collaborations très variées qui touchent autant aux musiques savantes que populaires: le jazzman Louis Sclavis, les compositeurs David Moss et Heiner Goebbels, le platiniste virtuose eriKm.
En 2003, elle s’appuie sur la musique de la rockeuse P.J. Harvey pour créer la pièce Publique. Sur le plateau, huit filles conjuguent leurs plaisirs de danser, ensemble, comme elles pourraient le faire en discothèque. Deux ans plus tard, elle cosigne le spectacle 2008 vallée avec le chanteur Philippe Katerine. À l’image de ce dernier, 2008 vallée présente un univers déjanté dans lequel le chanteur joue le jeu de la danse et les danseurs celui du chant. En 2008, elle crée Gustavia en duo avec La Ribot et en 2009 elle part de La Mort du Cygne pour donner naissance à Pavlova 3’23’’. En 2010, c’est en étroite collaboration avec le peintre Dominique Figarella que Mathilde Monnier signe la pièce Soapéra.
Loïc Touzé
Loïc Touzé est chorégraphe et danseur. Il développe son activité dans le cadre de l’association ORO, qui s’installe à Nantes en janvier 2010. Réalise des projets depuis une vingtaine d’années, souvent en collaboration avec d’autres artistes chorégraphiques mais aussi des artistes des champs des arts visuels, de la musique et du théâtre. Co-réalise avec Laris Frogier la manifestation Déplacer, pièces, danse et performances au centre d’art La Criée à Rennes (2000).
Co-dirige avec Yvane Chapuis et François Piron Les laboratoires d’Aubervilliers de 2001 à 2006. Enseigne régulièrement en France et ailleurs dans le monde.
Tanguy Viel
Tanguy Viel naît à Brest en 1973, où il passe les douze premières années de sa vie.
Objecteur de conscience au centre dramatique de Tours, “ses possessions sur terre se limitaient à six cartons, dont cinq de livre”, si l’on en croit François Bon. Il habite chambres de bonnes et greniers improbables, toujours proche du centre de la ville et de ses bars. “Par un temps sec et froid”, il se voit refuser un premier manuscrit par les éditions de Minuit, qui publieront son premier roman, Le Black Note.
Il n’a que vingt-quatre ans, et le ton est déjà posé : écriture ciselée et quasi-cinématographique pour personnages imparfaits, saluée franchement par la critique.
Suivront Cinéma, et l’Absolue perfection du crime, où il s’essaie à la forme littéraire du polar, et son dernier roman en date, Insoupçonnable.
Il a également publié des textes plus courts chez Inventaire Invention, Maladie, et Tout s’explique, où par le biais d’une lecture critique d’Explications (livre d’entretiens entre Pierre Guyotat et Marianne Alphant), il livre sa vision du monde qui nous entoure, de la littérature et plus particulièrement de ce qu’il appelle “la fabrique de l’écriture”.
Tanguy Viel a travaillé avec le metteur en scène Gilles Bouillon à l’écriture d’une pièce de théâtre pour cinq acteurs du centre dramatique régional de Tours, présenté en 2007.
En 2009, il publie un nouveau roman, Paris-Brest, aux éditions de Minuit.