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Night Inside of Painter’s House

PMaxime Thieffine
@12 Jan 2008

Ciels, ruines, accidents. Les peintures d’Armando Marino, tendues entre image et abstraction, jouent avec le regard du spectateur le faisant glisser de la rêverie contemplative à une empathie réflexe devant des vues de catastrophes violentes.

Accueilli d’emblée par un enfant jouant dans les branches d’un arbre aux couleurs incandescentes, le spectateur de cette exposition personnelle d’Armando Marino va ensuite se promener dans des paysages, à différentes échelles, mais toujours dans des paysages défaits ou ravagés. Le sujet de ses toiles, figuratives, est clairement inspiré des médias et des images de presse documentant des catastrophes (tsunamis, tremblements de terre, inondations, etc.), images hantées bien sûr par l’iconographie de Ground Zero.

La peinture d’après les images photographiques et médiatiques offre à Armando Marino de l’expressionnisme ready-made, comme a pu le cristalliser de façon limpide la Giulietta de Bertrand Lavier. Le geste et l’action sont dans le réel, il suffit de le documenter.
Mais ici, rien à voir avec l’ironie du peintre français, les images du cubain nous plongent dans un état instable entre ce réflexe analogique d’empathie, qui nous saisit devant une image de catastrophe, et la rêverie offerte par la plasticité de l’image même. Il y a là deux beautés entremêlées: celle des formes aléatoires prises par le réel et celle des couleurs et de la matière picturale. On s’est émerveillé devant les formes des champignons nucléaires ou devant l’effet dramatique d’un tsunami filmé live par un amateur.

Marino explore ces effets dramatiques et leur ralentissement sous le geste de la peinture. D’une façon proche des peintres hyperréalistes et de Malcolm Morley en particulier (ses peintures de skieurs et nageurs), le regard blasé et fatigué contemple l’action ou la catastrophe du dehors, comme si elle était vue depuis un autre monde.
Comme ce personnage au sommet d’un escalier en ruine donnant sur un ciel vert. Les objets culturels (maisons, voitures) retournent à un état de nature, et la peintre accompagne ce mouvement en superposant l’artifice plastique de ses couleurs et de son geste expressionniste à la fidélité d’une vision documentaire.

Maison abandonnée et menaçante (The Night Inside of the Painting House), bords de mer pollués (Radioactive), carcasses de voitures ou ruines romantiques (Coming From Nowhere) sont peints comme des visions hallucinées.
Des visions de nuit, phosphorescentes et radioactives, comme si l’atmosphère perceptible et dense s’était matérialisée dans la couleur et la lumière qui pénètre ainsi nos yeux.

Ce prolongement de l’image et de sa matérialité dans l’œil explique aussi les différents formats de toiles et d’échelles de l’accrochage. Il met ainsi en jeu un travail de focalisation et de réajustement visuel. Ce qui l’inscrit dans une filiation évidente de la peinture de la fin du XIXe siècle, celle des Nabis (coté Vuillard pour ces basculements entre gros plan et vue d’ensemble), celle des Fauves (Matisse et Derain), celle de l’Expressionnisme d’Emil Nolde et donc dans la lignée des visions nocturnes saturées et proto-psychédéliques du Van Gogh de La Nuit étoilée sur le Rhône du Musée d’Orsay par exemple.
Loin d’être nostalgique et rétrograde, cette veine trouve des échos dans l’art actuel. Marino a beaucoup exposé aux Pays-Bas et en Espagne ces dernières années et cette première exposition personnelle à Paris permet de découvrir un artiste aux préoccupations contemporaines.
Son style qui figure des formes en arrondis et en halos multicolores et épais évoque les paysages urbains de Carole Benzaken ou les anatomies minérales de Daniel Schlier.

Concernant les sujets peints, Marino appartient à une famille d’artistes où l’on pourrait identifier Jin Meyerson (vu récemment chez Perrotin), Daniel Richter (la toile à l’entrée de «Big Bang» à Beaubourg), David Schnell, Lee Maelzer, Roger Kelly… Une famille où la peinture est hystérique.
En voulant jouer sur tous les tableaux, elle multiplie les sujets et les styles afin de tisser la toile au réel, elle multiplie les effets plastiques au risque de la saturation et de l’auto-parasitage.

Armando Marino
— Untitled (Crash), 2006. Huile sur toile. 45 x 80 cm.
— Coming from Nowhere, 2006. Huile sur toile. 280 x 181 cm.
— The Night Inside of the Painting House, 2006. Huile sur toile. 190 x 213 cm.
— Storm, 2006. Huile sur toile. 44 x 58,5 cm.
— Tree Boy, 2006. Huile sur toile. 180 x 245 cm.
— The Hole, 2006. Huile sur toile. 200 x 236 cm.
— Untitled (Crash), 2006. Huile sur toile. 41,5 x 41 cm.
— Dreaming, 2006. Huile sur toile. 55 x 55 cm.
— Fly me There, 2006. Huile sur toile. 104,5 x 136 cm.
— Radioactive, 2006. Huile sur toile. 240 x 191 cm.
— Flying, 2006. Huile sur toile. 122,5 x 191 cm.
— They Had Gone, 2005. Huile sur toile. 57 x 84 cm.

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