Aaron Curry
Newdz And New Godz
«There came a time when the Old Gods died!» Jack Kirby
«Newdz And New Godz» présente un ensemble de nouvelles œuvres de l’artiste américain Aaron Curry. S’articulant autour des motifs graphiques de peau et de poils photographiés de près, l’exposition rassemble une constellation de références: de l’histoire du collage et du nu, au tueur en série nécrophile Ed Gein, en passant par les déguisements d’enfant.
Les sculptures de Aaron Curry sont composées de segments de bois irréguliers, sur lesquels sont imprimées des images de peau agrandies. Présentées comme dans une grande salle de statuaire classique, elles inversent le mythe de Pygmalion en aplanissant plutôt qu’en animant la chair imprimée, et en confrontant la promesse de vitalité inhérente à la peau humaine à sa condition morbide, lorsqu’elle se trouve réduite au statut de surface. Rappelant les colossaux Baigneurs de bord de mer de Picasso, elles transforment le nu — symbole d’épanouissement mais aussi de désir contenu — en un assemblage incertain et précaire de fragments, tour à tour cachés, vus de profil, ou en vue frontale.
Telles une version dénudée de la Bekleidungstheorie architecturale de Gottfried Semper, les salles de l’exposition sont habillées de panneaux sérigraphiés comportant des images de barbes et de peau. Aux côtés des sculptures faites de matériaux rigides et industriels, qui contestent la spontanéité de leurs propres contours, les panneaux évoquent une histoire artistique de la reproduction mécanique. Ici, la sérialité n’amène pas à l’uniformité mais simplement à une infinie variation. Le visiteur est entouré d’une sorte de duvet composé de peau, qui rassemble au tricot Warhol et Leatherface du célèbre Massacre à la tronçonneuse. L’interne se retrouve à l’extérieur, à une échelle monumentale.
Le travail de AaronCurry joue avec la logique du collage — le choc entre le grand art et le folklore, le poli et le rustre, Noguchi et Pappy Yokum.
Dans «Newdz And New Godz», les références à la culture populaire de masse sont plus restreintes, n’apparaissant principalement que dans une série de peintures de forme ovale, imprimées avec des images d’enfants extraites de manuels de peinture sur visage. L’artiste altère ensuite ces images, afin que la pose de ces enfants déguisés déborde désormais d’excrétions violettes. Accrochées sur un parterre de peaux et de poils greffés entre eux, ces figures sont le ciment d’un corps nouveau. Ces figures ne sont pas définies à travers une vie intérieure et des particularités psychologiques, mais par une profusion de différences et de similitudes — un principe de collage peut-être, pour la psyché.
Joanna Fiduccia