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New tales of Pleasantville

Les maisons du bonheur de Private Territories, construites en Lego® par de jeunes Autrichiens, sont commentées en allemand par leurs auteurs eux-mêmes —sous chaque tirage couleur se trouve en effet un casque de walkman équipé d’un lecteur Mp3 permettant aux visiteurs germanophones de se faire une idée précise des intentions des gamins.
Les phalanstères proposés sont, pour ce qu’on a pu en voir, étonnamment sages, raisonnables, convenus. Il s’agit de copies conformes de pavillons de banlieues et autres «folies» petites-bourgeoises. La seule fantaisie que s’autorise l’un des architectes en herbe est l’intégration d’une grande piscine découverte dans un décor rappelant celui de la villa Arpel.

New Tales of Pleasantville est une série encore plus inquiétante. Elle illustre le fantasme récurrent bien connu d’adultes souhaitant abandonner leur progéniture —dans le cadre idyllique du parc d’attractions, plutôt que, par exemple, en pleine forêt, comme dans le conte de Perrault. On est loin, apparemment, ici, du concept de garderie, de crèche, voire de parc proprement dit —rappelons que Vienne fut avec Budapest l’une des capitales européennes à innover en matière de Luna Park avec le Wurstelprater qui sert de décor au film de Carol Reed, The Third Man (1949).

Pleasantville, malgré son nom, n’a rien de vraiment amusant —les photos nocturnes de Robert F. Hammerstiel montrent un village fantôme aux couleurs criardes qui rappelle vaguement celui de la série télé pop de George Markstein et Patrick McGoohan, The Prisoner (1967-1968).
Des enfants pas très enjoués posent, un par un, à tour de (jeu de) rôle, comme les boutiquiers concentrés d’August Sander. Le photographe évite l’écueil du cliché pittoresque et, surtout, pédophilique. Le no man’s land qu’a choisi de montrer plein pot et en couleur Robert F. Hammerstiel n’a rien non plus d’utopique: c’est une reproduction clinquante, hyperréaliste, à échelle réduite, de la société marchande dans laquelle nous vivons.

Le diptyque All for Your Delight II est, apparemment, la version light d’une installation conçue à l’origine par l’artiste pour cinq moniteurs vidéo. Pour des raisons pratiques (l’espace de la galerie), mais aussi esthétiques (l’amateurisme ou l’absence de crédibilité de certains jeunes acteurs), le photographe a finalement décidé de disposer en angle droit, dans un coin de la salle du fond, deux écrans plats qui diffusent en boucle les sanglots de deux pré-adolescentes filmées en gros plan. Celles-ci sont d’autant plus convaincantes que le pleur, comme le fou-rire, une fois amorcé, se nourrit de lui-même, est irrépressible et se communique aisément. Elles offrent au spectateur une même grimace édentée.

Robert F. Hammerstiel
New Tales of Pleasantville, 2009. Photographies couleur, tirage C-Print marouflé sur aluminium. 120 x 150 cm.
Private Territories, 2007-2009. Photographies couleur, tirage C-Print marouflé sur aluminium avec lecteur MP3 sur casque. 110 x 140 cm.
All for your delight I et II, 2009. Vidéos couleur en boucle, sonore. 1 mn 43″.
Pleasantville. Photographies couleur.

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