Alain Buffard et Nadia Lauro
New Settings #2. Baron Samedi
Plus encore qu’un style, Alain Buffard a un univers. Il y convoque Kurt Weill, ses rengaines populaires et sa musique savante, ses mauvais garçons et ses drôles de dames. Un peuple d’exclus et de renégats que Baron Samedi, esprit vaudou de tous les excès, entraîne dans une danse de vie et de mort, violente et jubilatoire, lascive et brutale. À sa façon, âpre et distanciée, avec une tendresse sans illusions, Alain Buffard leur offre, comme au public, un espace de liberté.
«Je ne veux pas encarter le spectateur», dit-il. En virtuose de la trangression, il brouille les pistes du bien et du mal, du masculin et du féminin, du dominant et du dominé, bouscule les archétypes black, les répertoires et les emplois. Osant une distribution hors normes, il confie une lecture de l’œuvre de Kurt Weill revisitée à des performeurs originaires des USA, de France, de Côte-d’Ivoire, d’Afrique du Sud, du Rwanda, toutes et tous artistes de haut-bord, échappés des répertoires attendus du rap ou du jazz, porteurs d’une histoire parfois tragique.
Spectacle étincelant et dur comme un diamant noir, Baron Samedi s’inscrit dans l’esprit de transmission qui fait l’âme du programme New Settings. Page blanche largement déployée, l’installation conçue par la plasticienne Nadia Lauro propose à Baron Samedi une éloquente aire de jeu. Pentue, cornée, ourlée, immaculée mais diabolique, elle précipite dans les abîmes de la déchéance ou conduit aux vertiges de la domination. Elle est une partition, une vague, une voile, la proue d’un navire, peut-être négrier, c’est l’offre de tous les possibles pour n’en choisir aucun… «Mais les marges aussi sont importantes», dit encore Alain Buffard…
critique
New Settings. Baron Samedi