Chorégraphie pour deux danseurs, Les Ombres blanches (2015), de Nathalie Pernette, s’adresse aux jeunes publics, dès six ans. Tandis qu’approche le solstice d’hiver, la nuit grignote le jour, laissant plus de place aux fantômes. Ceux qui, en draps blancs, arpentent le monde d’un pas furtif. Amis ou ennemis ? Présences autres. Et jouant sur les dispositifs, Nathalie Pernette construit ici un monde de lisière, entre vie et trépas. Puisant dans différentes cultures, Les Ombres blanches dansent et voltigent de façon irréelle. Le flottement, l’espièglerie de corps sans tête, de mains sans corps, de chaises bougeant seules, de brumes lentes et envoûtantes… La sorcellerie blanche de Nathalie Pernette opère une plongée dans l’univers des spectres. Du fantôme, au fantasme, au photon : elle remonte les étymologies jusqu’à la fantomatique racine indo-européenne bhabho [éclairer, briller]. Et sur une musique de Franck Gervais, les deux danseurs hantent ainsi vivement la scène.
Les Ombres blanches de Nathalie Pernette : un spectacle tout public, dès 6 ans
Phénomènes évanescents ou encombrants, les fantômes, spectres et revenants se manifestent de différentes manières. Avec Les Ombres blanches, ce sont ces manières d’apparaître que déploie Nathalie Pernette. Comme un herbier des façons de faire fantôme. Un léger frisson, un souffle, un courant d’air… Un craquement de plancher, un objet qui tombe, qui se déplace seul… Une lueur qui vacille alors qu’il n’y a pas de vent… Une légère complainte au loin… Une danse endiablée au clair de lune, un tourbillon hilare d’esprits taquins, chagrins, plaisantins… Les fantômes ont plus d’un mouvement dans leur sac. Et sur scène, les deux interprètes — Anita Mauro et Lucien Brabec ou Vincent Simon — virevoltent. Avec un humour joyeusement macabre, la pièce Les Ombres blanches aide ainsi à apprivoiser la peur de la mort. Qui sont ces spectres qui emplissent l’espace ? Présences attentives, calmes, imprévisibles et farouches : pour les percevoir il faut aussi savoir tendre l’oreille.
Chorégraphie de fantômes : la magie blanche des ombres dansantes et espiègles
Cultivant un bizarre joyeux, Les Ombres blanches mobilise un espace plongé dans une pénombre chaude et capricieuse, pour reprendre les mots de Nathalie Pernette. Avec une succession de vignettes dansées, entre jeux d’ombres et lumières solides. Parfois un léger parfum évoque une insaisissable présence. De doux chuchotements, quelques coups sourds, une musique rythmée pour des danses hypnotiques… La pièce Les Ombres blanches flirte ainsi avec la magie pour emplir l’espace d’évocations. Dans des costumes de Fabienne Desflèches, oscillant entre butô et Pierrot lunaire (commedia dell’arte). Sur une scène sobrement peuplée de structures en bois, comme une charpente squelettique aux murs invisibles. Car le regard des publics traverse les murs pour mieux plonger dans cette drôle de maison hantée. Et chorégraphie habitée, Les Ombres blanches fonctionne alors un peu comme ces histoires qui font peur, à se raconter au coin de la cheminée, blottis les uns contre les autres.