Encore peu connue du public français, la chorégraphe australienne Lucy Guérin s’est d’abord fait connaître aux Etats-Unis dans les années 1990 avant de présenter en France Black Box, pièce créée en 2013 pour le ballet de l’Opéra de Lyon puis, deux ans plus tard, Weather. Sa nouvelle création, Motion Picture, se caractérise d’emblée par son originalité, bien que le procédé soit désormais répandu, puisqu’elle est écrite à partir du film de Rudolph Maté D.O.A., Death on Arrival, réalisé en 1950. Avec Motion Picture, Lucy Guerin donne sur scène une interprétation chorégraphique de ce film traitant de l’empoisonnement d’un homme et de son agonie.
Motion Picture : danse et images
Tout au long du spectacle, Death on Arrival ou Mort à l’arrivée, est projeté dans son intégralité sur des écrans installés derrière les spectateurs et sur les côtés de la salle. Seuls les danseurs, sur scène, font face aux écrans alors que le public entend les sons et en perçoit la luminosité. Quant à eux, les six danseurs ne se contentent pas d’incarner les personnages du film dans une situation donnée, car l’intention de Lucy Guerin n’est autre que « voir quelle danse émerge quand on utilise le film comme partition musicale. »
Motion Picture : le mouvement en question
Si le film donne son rythme au spectacle, et les interprètes reproduisent fidèlement jusqu’au mouvements des lèvres des acteurs, ils répondent et réagissent aux gestes et aux émotions exprimées par les acteurs. Progressivement, la chorégraphie se défait de la simple restitution du film sur le plateau. La danse se détache alors de l’image ; tenue à distance, les seuls gestes des danseurs tendent alors à se substituer au principal protagoniste du film. Désormais affranchie de l’image, la chorégraphie donne à voir toutes ses possibilités visuelles, devenant en quelque sorte un film en soi. Motion Picture propose par là même une autre interprétation de l’intrigue originale en portant un regard critique sur les procédés cinématographiques.