Vincent Bizien
Mothman Circus
Dans le monde de Vincent Bizien, il y va tout à la fois de l’idée de mascarade, de danse de mort, de jeux interdits et de mystérieux rituels dont les acteurs sont le plus souvent des figures juvéniles apeurées, comme si elles pressentaient l’avènement d’une catastrophe ou en revenaient stupéfaites de ce qu’elles avaient vécu.
Leurs visages simplement silhouettés ou violemment brouillés composent toute une galerie de masques qui témoignent d’un regard troublé sur l’autre. Comme si l’artiste lui-même avait peur de ses propres personnages et se laissait emporter dans une sorte de sarabande existentielle qu’il tentait par suite de transcrire d’un dessin à l’autre.
Vincent Bizien ne se raconte pas des histoires. Il met au monde des visions, travaillant sous le coup de l’impulsion, dans un état émotionnel intense. Aucune espèce de règle ne gouverne sa démarche sinon l’absence de règles de sorte à laisser advenir les images sans préliminaire aucun. Un peu comme on va à la pêche au chalut.
Centré sur l’idée de portrait, sinon de figure, son travail puise aux sources les plus diverses, qu’elles soient culturelles —comme Goya, James Ensor ou Louis Soutter— ou autobiographiques —un visage croisé dans la rue qui le frappe, une image aperçue dans les médias, le souvenir d’une lecture, etc.
Quelque chose d’une débâcle et d’une perdition est à l’œuvre dans le travail de Bizien à l’instar des héros des romans de Richard Brautigan, thuriféraire de la contre-culture, surnommé le «dernier des Beats», auteur de La pêche de la truite en Amérique, best-seller de l’année 1967. Le même sentiment d’empathie, la même errance, la même atmosphère poétique, les mêmes inconnues de temps et d’espace.
Si l’un des thèmes récurrents de Vincent Bizien est le cirque, c’est qu’il désigne par excellence une arène où tout se joue et qu’il met en scène les deux faces, grinçante et drolatique, de l’homme. C’est aussi parce que le cirque sous-tend l’idée de parade et de la vie à côté, qui mêle l’étrange et le merveilleux, le bizarre et la fable, le banal et l’insensé. Et que le cirque détermine comme un lieu de résistance et de dérision à toute dérive humaine.
Philippe Piguet
Vernissage
Samedi 12 octobre 2013 Ã 16h