Joachim Schmid
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La passion de l’artiste allemand Joachim Schmid pour la recherche d’image et leur assemblage donne à son travail un but sans fin en raison des milliers de photographies qui nous envahissent chaque jour. Leur affolante profusion justifie, selon lui, l’inutilité d’en créer de nouvelles. Il les collecte et les regroupe en séries. Elles sont ainsi réinvesties à des fins artistiques. Les modes de collecte sont divers: photo trouvée dans la rue au hasard de ses promenades, négatif récupéré, image numérique disponible sur internet par le biais des moteurs de recherche, photographie publiée par voie de presse ou à des fins publicitaires… L’origine de ces images est variée comme le sont les multiples sources qui nous inondent de visuels.
Cette exposition, sixième présentation des travaux de l’artiste par la galerie, réunit deux séries inédites.
La série «Bilderbuc», débutée en 2011, est une collection d’images à l’origine imprimées. Elles sont présentées décontextualisées et sans aucun commentaire. Leur juxtaposition en dehors de toute explication questionne notre rapport au sens de ce qui nous est présenté. Elles ne servent plus à l’illustration d’un propos, elles ne nous guident pas dans notre compréhension, ne sont pas à même de nous influencer dans une interprétation qui pourrait être erronée ou fallacieuse. Elles n’ont plus de fonction et du coup se révèlent pour ce qu’elles sont: belles, abstraites, incongrues, intrigantes, déroutantes, déplaisantes … Mais elles éveillent aussi notre besoin de donner sens et on leur cherche alors un pourquoi ou un comment qui justifierait leur existence.
La série «Estrelas amadas — Beloved Stars», 2013, reprend des photographies noir et blanc de vedettes de cinéma reproduites dans un magazine portugais des années 50. L’ancienne propriétaire de la revue, probablement une jeune lisbonnaise, avait colorié, d’un rouge des plus brillant, les lèvres de toutes ses stars adorées et ce peu après avoir acquis le magazine. Des décennies plus tard, cet exemplaire s’est retrouvé sur un marché aux puces où l’artiste à son tour en a fait l’acquisition. En sélectionnant cette série de photographies, Joachim Schmid recycle ces images, issues de la presse et produites en milliers d’exemplaires, devenues uniques et anecdotiques par le rouge vif des lèvres des actrices.
Joachim Schmid s’intéresse à la photographie sans pratiquer la photographie. Il se questionne et nous questionne quant au sens de cette avalanche d’informations visuelles dans laquelle nous sommes plongés sans même en avoir une réelle conscience. Il pose la question du multiple et de l’unique, du sens et du détournement et ce par la collecte et la réunion en série d’images aux provenances multiples.