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Monolithes ou l’architecture en suspens (1950-2010): artistes et architectes

18 Sep - 30 Jan 2011
Vernissage le 05 Oct 2010

Entre onirisme et archaïsme, entre imaginaire et espace critique, se tient le «monolithe», des mégalithes de Stonehenge à 2001 L’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick.

Raimund Abraham, Paul Andreu, Architecture Principe, André Bloc, Frédéric Borel, Andrea Branzi, Chanéac, DOGMA, David Georges Emmerich, Gunter Gunschel, Hans Hollein, IaN+, Jan Kempenaers, Aglaia Konrad, Ugo La Pietra, Claude Parent, Gianni Pettena, Walter Pichler, Charles Simonds, Pierre Székely, Marino di Teana, Vincent Mauger…
Monolithes ou l’architecture en suspens (1950-2010). Artistes et architectes de la collection du Frac Centre

Le monolithe traverse l’histoire de l’art comme celle de l’architecture: «inquiétante étrangeté» de la nature chez les Symbolistes (L’Île aux morts, 1883, d’Arnold Böcklin) et les Surréalistes; force transformationnelle chez les Expressionnistes (Mendelsohn, R. Steiner, etc), le monolithe a toujours été marqué du sceau d’une double nature, à la fois tellurique et mentale. Sa monumentalité fut intériorisée en masse psychique chez Frederick Kiesler (Maison sans fin/Endless House, 1930-60).

Cette exposition au Frac Centre retrace pour la première fois cette histoire paradoxale du monolithe, des années 1950 à aujourd’hui, en plusieurs chapitres thématiques, réunissant une sélection exceptionnelle d’oeuvres d’artistes et de projets d’architectes à travers dessins, maquettes, films, installations, archives.

Mégalithes

Dans les années 1960-70, en Autriche, Hans Hollein détourne l’architecture en image à la manière du pop art, et fait flotter dans le ciel des rochers informes, nuages pétrifiés, accrochés au sommet d’architectures ou de montagnes, problématisant la naturalité et l’artificialité de l’architecture.

Les monolithes de Hans Hollein sont des objets extra-territoriaux, mus par leur seule étrangeté et radicalité. Entre primitivisme et critique de la fonctionnalité, ces monolithes sont une non-forme qui est aussi celle de l’indétermination formelle de la Ville compacte (1963) de l’artiste Walter Pichler.

Architecture-sculpture

Dans le sillage de l’expressionnisme, l’architecture-sculpture s’empare du monolithe comme garant de l’unité de la forme. La masse compacte et expressive du monolithe évolue vers sa géométrisation (avec l’artiste Marino di Teana par exemple) ou vers une dimension organique (Bloc, Székely, La Pietra, etc).

Des films de l’artiste Aglaia Konrad (2007) font redécouvrir ces architectures brutalistes, de Fritz Wotruba à la première maison en béton en Belgique dans les années 1960.

Espace cryptique

Le monolithe est ici l’espace inversé de la grotte ou de la caverne, renvoyant aux mythes de l’origine. L’église Sainte-Bernadette-du-Banlay (1963-66) à Nevers, réalisée par Claude Parent et Paul Virilio, s’inscrit au confluent de la grotte de Bernadette Soubirous, de la dimension cryptique du bunker et de la dynamique spatiale de la fonction oblique. Fracturé, le monolithe se donne dans sa faille, comme une architecture «négative», de refus (F. Migayrou).

Le projet de Mémorial pour Yves Klein (1964) de Claude Parent se réfère également à la notion de «crypticité» développée par Paul Virilio. L’espace cryptique est aussi la forme négative du globe, monolithe de béton de l’aéroport de Roissy par Paul Andreu (1968).

Cristallisations

Dans les années 1960, Andrea Branzi dessine des «Structures en liquéfaction dans l’espace», agrégats géométriques qui explosent en autant de parcelles cristallisées de monolithes. L’espace géométrique est ici érodé par l’irrégularité du monolithe.

A la même époque, la complexité des formes polyédriques de D.G. Emmerich interroge l’espace topologique dans le sillage de l’«utopie du cristallin» du XIXe et XXe. Ses empilements autotendants se donnent comme une agglomération cristalline, monolithe aux pliures morphogénétiques.

Cette cristallisation qui facette la forme et rend son ancrage impossible est aussi celle de sculptures de l’artiste Vincent Mauger.

Monumentalités critiques

Récurrent dans l’architecture de l’après-guerre, la figure du monolithe est une concrétion brutale de nature et d’architecture. Les monuments aux morts photographiés dans l’ex-Yougoslavie (2007) par l’artiste Jan Kempenaers témoignent bien de la dimension de cénotaphe du monolithe.

Dans un registre conceptuel, DOGMA avec Pier Vittorio Aureli scrute la notion d’anti-monument, d’autonomie de la forme, de contexte, à travers le projet Stop-City (2007), inspiré de Superstudio. Ici le monolithe délimite un espace clos, impénétrable, mettant en suspens son environnement.

Réfutation de tout formalisme, de tout présupposé esthétique, le monolithe aura traversé l’expérimentation architecturale du XXe siècle.

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