La compagnie belge Peeping Tom présente Moeder, deuxième partie d’une trilogie familiale commencée en 2014 avec la pièce Vader. Moeder, la mère, spectacle chorégraphié par Gabriela Carrizo, fait donc suite à Vader, le père, pièce créée par Franck Chartier, qui était une véritable incursion hallucinée dans une maison de retraite. Moeder entend cette fois-ci sonder les méandres inconscientes de la figure tutélaire de la mère.
Moeder : inquiétante familiarité ?
Pièce pour huit danseurs créée en 2016, Moeder se distingue au premier abord du volet précédent, Vader, par son décor. Clairement identifié dans cette dernière pièce, celui de Moeder semble jouer au contraire d’un contraste entre l’attente suscité par le titre et le décor lui-même. Quel rapport le spectateur peut-il tenter d’établir entre l’évocation directe de la mère et un décor laissant apparaître des murs en béton auxquels sont accrochés quelques tableaux, des chaises, une machine à café, un piano électronique rangé dans un coin, et une pièce vitrée aux rideaux gris faisant à la fois office, au cours du spectacle, de studio d’enregistrement et de maternité ?
Ces objets et ce lieu exposé aux regards se révèlent familiers, mais cette familiarité sera en quelque manière troublée par l’apparition de la mère. Dès lors, les éléments du décor mettent à jour ce qui habituellement n’est pas dit ou ne saurait être dit dans la vie quotidienne. La mère apparaît, enfermée dans son cercueil, derrière la paroi vitrée. Et son apparition rend alors possible l’expression de sentiments refoulés, de souvenirs enfouis, et de rêves, dévoilant désirs, craintes et angoisses. Autant d’affects révélés par cette mère morte qui, d’abord, donna la vie.
Moeder : l’immédiateté auditive
La mère une fois apparue, les personnages présents sur scène jouent successivement les rôles de mère, de gardiens, de femme de ménage, de sage-femme, ou de simples visiteurs. Au travers d’une telle succession, Moeder se présente alors comme le récit chaotique et fantastique d’un univers psychique par définition insaisissable. Comment une chorégraphie peut-elle alors traduire l’obscurité des sentiments suscités par la mère ?
De manière frappante, Gabriela Carrizo a pris le parti de recourir à l’utilisation de sons, lesquels sont étroitement liés aux différents personnages, danseurs, et objets. Qu’ils soient émis par le corps, les objets, ou les danseurs, les sons permettent d’attirer l’attention des spectateurs sur un détail de la mise en scène, ou une situation particulière.