Ode Bertrand
Modulation
Elève de Nemours et de ce fait, nourrie de son exemple, Ode Bertrand à retenu de l’artiste une rigueur sans compromis dans la facture de la toile et de l’épuration formelle qui en découle. Aussi, l’abstraction géométrique, et la tendance de l’art concret sont venues à elle sans détour, car beaucoup d’artistes proposant ces concepts ont souvent, dans un premier temps, travaillés la figuration.
Développant ainsi son propre langage, et depuis plus de 40 ans maintenant, peignant encore à l’huile elle se consacre à l’art du trait dans une radicalité qui lui est propre.
Ode Bertrand s’intéresse essentiellement au noir et blanc, traçant systématiquement sur ses supports un quadrillage de lignes droites sur une surface blanche, elle applique par la suite le noir à la fonction graphique qui permet, selon elle, de structurer l’espace. Elle aime le trait, le rythme, la forme…
Ode Bertrand expose des œuvres réalisées ces cinq dernières années sous la forme de trois séries : Losanges couleur, Ahura et Pârvatî. Rappelons ici que l’artiste à souvent travaillé ses œuvres par séries. Ce n’est que lorsqu’elle sent qu’une œuvre n’accrochera plus autant son regard, qu’une série atteint sa finalité.
Dans les trois séries exposées, une innovation apparaît: la couleur vive fait son entrée, «un peu comme un cri» qui reste toutefois contrôlé et retenu.
Des éclats blancs ou des couleurs «violentes» voire «hurlantes», apparaissent sur fond de nuances sombres. Selon ses propres termes, une notion de «passages» survient: l’artiste fait des «sauts» dans la couleur, passant du vert au rouge, du bleu à l’orange mais avec toujours une valeur sombre. A première vue, la couleur vive rend la lecture immédiate et le tableau devient plus vivant, mais lorsque la composition sombre apparaît, une lecture plus cachée, plus mystérieuse nous plonge dans une sorte de calme contemplatif et silencieux.
Les couleurs ne se chevauchent pas, les œuvres sont réalisées avec une grande précision et dans un esprit géométrique pur; les segments sont déplacés ou supprimés et on observe volontiers des décrochements obliques et parfois même des variations dans l’épaisseur du trait.
Selon Fernand Fournier dans les Chants croisés de l’ordre et du chaos édité en 2005, les œuvres d’Ode Bertrand appartiennent à la tendance la plus rigoureuse de l’abstraction, son art se nourrit de la violence d’antagonismes chromatiques et formels qui, du fait de leur radicalité même, méritent d’être interrogés.