A travers dessins, murs peints, collages et sculptures, cinq artistes déclinent leur goût du motif infiniment répété dans les configurations les plus rigoureuses et les plus ludiques. La liberté du geste permet toutes les correspondances et les échanges. Comme le titre de l’exposition l’indique, entre le macrocosme et le microcosme, entre l’extensibilité des formes et l’intimité, se déploient des univers vivement colorés, à la fois organiques et abstraits.
David Shaw travaille sur des formes aléatoires issues de la nature végétale, minérale ou organique : par exemple à partir de bulles émises par un plongeur sous l’eau (Breath, 1983) ; il crée aussi des formes en aluminium qui ressemblent à des flaques de mercure (Vehicules, 1992-1993). Ses dessins au stylo bille évoquent les réseaux d’information et les circulations naturelles fluides. Ils répondent avec simplicité aux dessins d’Alexander Ross, qui présente également de grandes peintures à l’huile, très graphiques, dans lesquelles les formes tirent leur géométrie du biologique, jusqu’à l’intrusion de l’informe. Ross s’inspire des évolutions du ciel et des éléments mouvants du paysage pour créer ses formes ambiguës ; il peut aussi observer, à l’aide d’un microscope, le comportement sexuel du pseudoscorpion, dans le but d’accéder aux figures élémentaires cachées de la nature et de les restituer au moyen de la peinture, dans la plus grande abstraction, à perte de vue.
Francis Baudevin se sert des boîtes de pellicules photographiques ou de produits pharmaceutiques pour explorer les codes et les univers graphiques dont nous sommes imprégnés. Entre design et arts plastiques, du collage au mur peint, il agrandit, reproduit des logos, des dessins d’emballages. Dans les surfaces abstraites créées, la couleur participe avec finesse au sampling, au recyclage et au mixage des supports, à l’interprétation à l’infini des formes et des espaces, au brouillage des pistes et des références.
Stéphane Magnin a lui aussi utilisé les motifs abstraits pour concevoir un plafond en papier peint dont les couleurs composent d’une manière ludique un espace géométrique assez doux, un échange libre, visuel. Utilisant les matériaux de la société post-industrielle, Magnin montre ici très simplement, juste dans la répétition, comment derrière ces papiers peints réside l’obsessionnel, le désoeuvrement, l’indifférence que suscitent des décors quotidiens construits pour le plaisir domestique des classes moyennes.
Claude Closky a suspendu au plafond un mobile métallique, léger, non loin d’un dessin au stylo bille très simple.
Il poursuit ici aussi son brouillage des classifications et des postures sociales, des codes et des réseaux fragmentés : le mobile est une réunion de segments susceptibles de varier dans leurs dimensions.
Cette exposition est bien une abstraction concrète et politique (l’hybridité comme infini pouvoir d’expression) construite sans rigidité, fondée sur des références diverses : de la nature à l’urbain le plus codé. Sont exprimées avec une douceur un peu acide les limites de toutes les fragmentations, structures et représentations. La référence à la nature comme univers infini de possibles et de temps est en relation directe avec présence aléatoire de la musique dans la galerie. L’art manifeste ici la volonté de rester tendu vers une forme d’immatérialité métaphorique des liens sociaux, sans quitter cependant le désir d’une rencontre physique avec le spectateur.
Francis Baudevin
Peintures murales :
— Ortofon, 2001. Acrylique sur mur. Dimensions variables.
— Ilford IF-2, 2001. Acrylique sur mur. Dimensions variables.
— Dessins encadrés, 1999. Impressions offsets insolarisées. Dimensions variables.
Claude Closky
— Mobile, 1995-2001. Fil et tiges métalliques. Dimensions variables.
— Stylo bille sur papier. 30 x 21 cm.
Stéphane Magnin
— Twirl O Paint, 2001.Technique mixte sur papier. 10 x 10 cm.
— Papier peint, 2001. 500 affiches 60 x 60 cm.
David Shaw
— Mindpool, 2001. Feutre à bille sur papier. 35,5 x 35,5 cm et 30,5 x 30,5 cm.
Alexander Ross
— Sans titre, 2001. Encre couleur sur papier. 38 x 28 cm.
— Sans titre, 2001. Graphite et crayons de couleur sur papier.