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Michel de Certeau

24 Mai - 29 Juin 2008
Vernissage le 31 Mai 2008

L’exposition «Michel de Certeau» vient conclure une série curatoriale qui interrogeait les rapports entre art et économie et témoigne du goût qu’ont les artistes pour les pratiques non normées, pour les jeux improductifs.

Communiqué de presse
George Brecht, Serge Comte, Clôde Coulpier, Raphael Charpentié, Stéphane Déplan, Jean Dupuis, Perrine Gamot, Séverine Gorlier, Ivars Gravlejs, Jiří Kovanda, Valentin Lechat, David Lefebvre, Fabrice Médina, Bruce Nauman, Clémence Périgon, Annika Ström, The Free Zoo, Ignacio Uriarte, Tomas Vanék, Jean-Michel Wicker
Michel de Certeau

Après l’exposition «Joseph Aloïs Schumpeter», Oui présente «Michel de Certeau». Cette proposition vient boucler une séquence curatoriale construite comme une discussion sur les rapports de l’art à l’économie, et après l’économiste hétérodoxe Schumpeter, c’est à l’anthropologue
Michel de Certeau de servir de figure de référence : son intérêt pour l’amateurisme, sa description des ruses et pratiques peu visibles inventées dans le flux du quotidien, viennent donner le change à la figure magnétique de l’entrepreneur convoquée par Joseph Aloïs Schumpeter.

Dans «Michel de Certeau» en effet, réparties dans quatre salles, les oeuvres témoignent du goût qu’ont les artistes pour les pratiques non normées, pour les jeux improductifs (comme le sont tous les jeux, par définition), et elles mettent en lumière des activités tordues, étranges, ou tout simplement émancipées.

Dans la première salle, l’activité dont il est question se veut ludique : le Tchèque Tomas Vanèk s’amuse à clouer des ballons de baudruche, Séverine Gorlier, par défi, réalise pour l’exposition sa première peinture, David Lefebvre construit une cimaise en placoplâtre, simplement pour le plaisir, Valentin Lechat dans Le mangeur de riz (2007) déclame de la poésie dont on ne sait s’il est autorisé d’en rire… Alors que oui, bien sûr, c’est autorisé, on peut en rire comme d’à peu près tout le reste.

Dans la deuxième salle, les oeuvres montrent que l’art peut être pratiqué comme l’est la cuisine : non qu’il faille utiliser des aliments, comme le faisait en son temps Daniel Spoerri avec son Eat Art, mais, comme la cuisine donc, les oeuvres peuvent apparaître toujours à refaire, à reprendre ou à poursuivre, dans une activité qui ne cessera jamais – parce que si l’on cuisine lorsqu’on a faim, si l’on mange ce que l’on a cuisiné, ensuite on digère, et plus tard, de nouveau, on a faim…

Dans la troisième salle, l’activité dont il est question est celle, intense, de la pratique d’atelier. Ici, à l’image de Bruce Nauman, dans les espaces privés qu’ils s’aménagent, les artistes rassemblés pour l’exposition ne cessent d’agir sans se préoccuper d’autre chose que de leur action. Cela n’a pas forcément à voir avec une technique précise, comme le dessin ou la peinture – Perrine Gamot par exemple plie de grandes et belles photographies comme s’il s’agissait de posters de magazine, Fabrice Médina élève des escargots… – mais c’est une question de précision et d’extrême concentration.

Et lorsque cette activité initiée dans les espaces clos des intérieurs s’aventure dehors (quatrième salle), elle peut ne rien perdre de sa densité. Dehors par exemple, Jean Dupuy ramasse des petits cailloux depuis des années, quotidiennement, au cours de ses promenades ; Jiří Kovanda décide de frôler doucement les gens dans la rue, ou de se cacher, ou de ne pas bouger ; Ivars Graveljs, avec la même légèreté folle, photographie des broussailles en Lituanie, ou des roues de vélos volés en République Tchèque, ou un palmier, un panneau, n’importe quoi, là où il se trouve, toujours en déplacement… Les artistes vont dehors donc, mais ils y sont toujours au travail, comme s’il ne fallait pas arrêter son
activité de peur d’être obligé d’en subir une autre, non choisie celle-ci. Rester dans l’activité donc, non pas pour s’épuiser au travail, mais pour échapper aux divertissements pauvres – et à la place préférer se distraire.

Les artistes, pour «Michel de Certeau», semblent détendus, tranquilles. Et l’art apparaît d’emblée comme une pratique qui peut tout simplement servir à être heureux.

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