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Michaël Sellam, We Came In Peace

PJulia Peker
@12 Jan 2008

De la conquête de l’espace aux rivages confus de Second Life, Michaël Sellam déploie les différentes facettes d’un univers moulé dans la technologie et les fantasmes.

Depuis la conquête de l’espace, l’homme a passé d’autres portes que celle de l’atmosphère. Franchissant le seuil de la réalité, il a mis le pied sur les rivages lointains du virtuel, où se projette un monde désincarné. C’est cet univers moulé dans la technologie que Michaël Sellam déploie dans son exposition personnelle à la galerie Pascal Vanhoecke, We Came In Peace.

Le titre de l’exposition reprend le message gravé sur le module lunaire de la mission Apollo 11 en 1969, message aussitôt obsolète quand on sait que l’exploration de l’espace fut d’emblée objet de bataille. Une série d’installations gravite autour du motif inquiétant de la navette spatiale, solennellement apprêtée pour partir en conquête.
Sur une des vidéos, un dessin en trois dimensions la montre sous toutes les coutures. Les images tournent en boucle sur différentes musiques: Michaël Sellam a demandé à plusieurs musiciens de réaliser un arrangement musical pour le même film. Chacune des versions se succède, composant un opéra pour l’espace.
L’engin de la conquête spatiale prend le visage mythique du célèbre vaisseau fantôme, condamné à l’errance pour avoir bravé la tempête divine. Les différents habillages musicaux donnent autant de visions du même objet, véhiculant toujours un nouvel imaginaire. Par ce procédé, Michaël Sellam montre les fantasmes qui accompagnent le lancement des fusées. L’exploration de l’espace est un sujet de spectacle, où rivalisent média, cinéma, et jeux vidéo.

Toutes les œuvres de l’exposition déclinent cette confusion entre prouesse technologique et imposture fantasmatique, l’absurde message d’une «conquête pacifiste», propulsé par les feux croisés de la réalité et du virtuel.

Sur un petit écran, des images de synthèse du fameux Second Life se superposent à des parcelles de terrain lunaire qu’on trouve en vente sur l’incroyable galaxie d’internet. Second Life a dépassé les bornes du jeu pour devenir une réalité virtuelle, dans laquelle s’est développée toute une économie marchande. Le monde de Second Life n’existe pas, et pourtant il est à vendre, et ses avatars l’habitent au gré de leurs désirs et de leurs bourses.
La surface de la Lune, elle, existe bel et bien, mais l’imaginaire l’a irradié de tant de projections aberrantes, qu’elle est un espace virtuel à l’instar de Second Life.

Une autre vidéo montre elle aussi une image qui semble être celle de la Lune.
L’écran est pourtant relié à une caméra filmant un vieux cendrier vide, mais sale.
Sans même pouvoir être habitée, la Lune est devenue un territoire de spéculations politiques et économiques, la surface où s’écrasent les rêveries conquérantes, où se consument les ambitions fumeuses de notre monde.

Michaël Sellam
— We Came In Peace, 2007. Photographie couleur et rhodoïd. 10 x 15 cm.
— Antigone 129, 2007. Vidéo.
— Unlock Mysteries, 2007. Installation sonore Platine. Disque vinil. 34 x 42 x 106 cm.
— Cascade, 2007. Installation interactive, techniques mixtes. 42 x 122cm.
Courtesy galerie Pascal Vanhoecke, Paris.
— The Flying Dutchman, 2007. Vidéo. 2,5 min. 16 compositions musique contemporaine.
— Prototypes, 2007. Gravures sur aluminum au laser. 33 x 29 cm.
— Unlock Mysteries, 2007. Disque vinyle.
— Cendrillon, 2007. Vidéo, programme informatique.
— Plugs’n’play, 2007. Installation 20 clés usb.
— Trigger, 2004. Vidéo interactive.
— Prospective Teleport, 2007. Vidéo
— Groove, 2007. Installation sonore.
— One flat thing, 2005. Installation.

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