— Auteurs : Paul Ardenne, Sylvie Froux, Ann Hindry
— Éditeurs : Le Parvis, Ibos / Centre d’arts plastiques, Saint-Fons / Frac Basse-Normandie, Caen / Maison de la culture d’Amiens
— Année : 2002
— Format : 21 x 28 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : 190
— Langues : français, anglais
— ISBN : 2-905130-73-3
— Prix : 34,40 €
Introduction
par Odile Biec, Sylvie Froux, Jean-Claude Guillaumon et Olivier Grasser (p. 7)
« Le sourd écoute le muet
L’aveugle regarde l’estropié danser »
Ce titre gravé sur une œuvre de Micha Laury datée de 1994 contient l’essentiel de ce sur quoi l’artiste a bâti son travail : l’enfermement, l’incommunicabilité, et pire encore, l’absence de conscience que nous avons de cet état. Cette aliénation projette un monde dangereux, violent, semé de pièges, où sont nécessaires des stratégies de protection, d’isolement, des systèmes de surveillance, des limites.
Ces œuvres où le corps est le support exacerbé de l’exploration de l’espace s’inscrivent dans des situations limites, paradoxales ou improbables, destinées à provoquer une fulgurance entre une conscience du monde et la réalité tout en l’éclairant d’une dimension critique.
Depuis 1967, Micha Laury applique une même méthode de travail : il dessine ses projets, expériences limites et situations singulières, et les réalise sous forme de sculptures et d’installations.
C’est à partir de cette pratique essentielle du dessin qu’il propose une rétrospective de trente-cinq années de travail : 144 projets sélectionnés dans l’ensemble de son parcours et redessinés à l’identique, soigneusement titrés et datés — date et titre occupant dans la feuille une place équivalente au dessin lui-même et indiquant ainsi clairement la prééminence du temps et le concept de chaque œuvre.
Cette déambulation est doublée par une vidéo-performance de 32 heures diffusée par tranches de 8 heures sur quatre moniteurs.
En effet, pendant une grande partie de l’année 2001, dans son atelier, il s’est astreint à recomposer sur une plaque métallique, l’un après l’autre et avec des allumettes, le titre des 144 dessins. Chaque fois, il y a mis le feu, remplaçant les mots par l’éclat et la lumière. À chaque nouvelle calcination, une trace ou mémoire s’est déposée sur la plaque métallique, la transformant peu à peu en témoignage des idées gravées dans la matière. Chaque titre brûlé est un éclairement de la pensée de l’artiste dans son parcours. En même temps, chaque idée n’est éclairante qu’à la condition de sa propre destruction. Il s’agit donc d’un sacrifice que Micha Laury donne à voir.
L’illumination de la conscience et la liberté qu’elle induit sont à ce prix.
(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions du Parvis — Tous droits réservés)
L’artiste
Micha Laury est né en 1946 au Kibboutz Negba, Israël. Il vit et travaille à Paris depuis 1974.
Les auteurs
Paul Ardenne est historien d’art, critique et théoricien de l’art. Il collabore régulièrement à diverses revues dont Art Press, Visuel(s), Parpaings, Archistorm.
Sylvie Froux est directrice du Frac Basse-Normandie.
Ann Hindry est historienne de l’art et critique d’art.