En 2019, le festival Montpellier Danse rend hommage à Merce Cunningham (1919-2009). Pour son centenaire d’une part, mais aussi parce que les liens entre le chorégraphe américain, dont l’œuvre aura opéré une jonction entre danses moderne et contemporaine, restent forts. En témoigne la demande de Merce Cunningham, de ce qu’une partie de ses cendres soient dispersées dans la Cour de l’Agora. Chose faite en 2010. Alors comment lui rendre hommage sans figer la souplesse de sa démarche ? En tissant un festival autour d’une question vive. À la fin du XXe siècle, les arts plastiques se sont demandé comment New York avait pu détrôner Paris. Aujourd’hui, Montpellier Danse demande pourquoi New York a perdu de son attractivité chorégraphique. Soit l’occasion de promouvoir la scène actuelle tout en rappelant les temps clés. Avec la reprise, notamment, de Summerspace et Exchange par le Ballet de l’Opéra de Lyon.
Festival Montpellier Danse 2019 : hommage au chorégraphe Merce Cunningham
Édition riche en pistes, le trente-neuvième Montpellier Danse rendra diversement hommage à Merce Cunningham. Avec le chorégraphe new-yorkais Miguel Guttierez et sa pièce This Bridge Called my Ass (2017), c’est toute l’énergie de la prospection qui se déploie. Avec Summerspace / Exchange, il est plutôt question de mettre en regard l’actualité de cette énergie avec des pièces de Merce Cunningham. Sous la direction de Yorgos Loukos, le Ballet de l’Opéra de Lyon reprendra ainsi Summerspace (1958). Pièce pour six interprètes, Summerspace se déploie sur une composition sonore de Morton Feldman. Et création totale (à la façon des recherches du Black Mountain College), Summerspace explore les interactions. Entre les perceptions du visuel, du sonore et du mouvement. La danse est chorégraphiée par Merce Cunningham ; la musique composée par Morton Feldman ; le décor créé par Robert Rauschenberg. Justaucorps et décors sont joyeusement peints, multicolores et pointillés. Entre explosion pop et camouflage.
Summerspace / Exchange : Merce Cunningham, par le Ballet de l’Opéra de Lyon
Pièce ample, Exchange (1978), pour quinze interprètes, reflète elle aussi l’effervescence artistique nord-américaine de la seconde moitié du XXe siècle. La musique y est de David Tudor, également membre du Black Mountain College et fameux interprète des 4’33 » (de silence) de John Cage, en 1952. Tandis que les costumes et décors sont composés d’après les dessins du peintre Jasper Johns. Pièce structurée en trois parties, Exchange joue avec le hasard — question chère à la théorie des jeux, au Black Mountain College, puis à Fluxus. Merce Cunningham y a ainsi utilisé des opérations aléatoires pour définir l’ordre des mouvements. Comme au Yi Jing (art divinatoire chinois, autrement nommé Livre des transformations) : l’ordre compose la narration. Un flux variable, dont les interprétations s’appuient sur ce qui précède et suit. Et ce défi de rejouer Merce Cunningham : le Ballet de l’Opéra de Lyon le relèvera ainsi pour Montpellier Danse.