L’exposition « Medusa – Bijoux et tabous » au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris propose une lecture contemporaine du bijou, à travers plus de quatre cents pièces créées par des artistes, des designers et bijoutiers contemporains ou encore des bijoux d’origine ancienne et non occidentale.
Le bijou, entre parure et sculpture, entre art et décoration
L’exposition adopte un angle transversal pour explorer en profondeur la nature ambiguë du bijou qui est à la fois une des moyens les plus anciens et universels d’expression artistique et un objet rarement reconnu comme œuvre d’art. En explorant les innombrables formes, valeurs, statuts et usages que revêt et a revêtus le bijou, l’exposition révèle sa richesse autant que les tabous qui l’entourent.
Partagé entre parure et sculpture, trop précieux ou au contraire trop rudimentaire et trop décoratif pour être artistique mais abordé par nombre d’artistes, le bijou divise. Une division qu’exploite l’exposition pour mieux remettre en question les limites traditionnellement établies entre l’art, l’artisanat, le décoratif, la mode ou encore la culture pop. Elle réunit pour cela des œuvres d’artistes avant-gardistes et de créateurs contemporains qui se sont approprié le bijou et l’ont réinventé.
Le parcours est divisé en quatre parties correspondant aux thèmes de l’identité, de la valeur, du corps et du rite. Au début de chaque partie sont exposés des postulats négatifs à propos des bijoux, qui sont ensuite invalidés et déconstruits.
De nombreux bijoux conçus par des artistes témoignent du lien entre l’art et la bijouterie. Ainsi une reconstitution de l’œuvre Drain Strainer Piece d’Anni Albers et Alexander Reed, réalisée en 1988, qui forme un collier à partir d’une grille d’évier, de trombones et d’une chaînette, ou encore le pendentif Bitten Crystal réalisé en 2005 par Danny McDonald en verre et argile polymère. D’autres pièces créées par Man Ray, Alexander Calder, Salvador Dali, Lucio Fontana, Niki de Saint Phalle ou Louise Bourgeois prouvent l’intérêt qu’ont montré de logue date les artistes pour le bijou.
Les bijoux, de Man Ray et Salvador Dali à Suzanne Belperron et Victoire de Castellane
L’exposition entend cependant faire dialoguer des pratiques qui habituellement ne se croisent pas et dépasse donc le cas des bijoux d’artistes pour interroger la part artistique des réalisations de bijoutiers contemporains comme Gijs Bakker, Dorothea Prühl, Otto Künzl et Seulgi Kwon, de designers comme René Lalique, Line Vautrin, Suzanne Belperron, Art Smith et Tony Duquette, maisons de joaillerie comme Van Cleef & Arpels, Cartier, Victoire de Castellane et Buccellati…
Des créations d’artistes ou d’artisans et professionnels reconnus auxquelles se mêlent, refusant la hiérarchisation traditionnelle, des pièces d’amateurs, des bijoux fantaisie, des parures ethniques, médiévales, ou préhistoriques…
Enfin, une vingtaine d’installations d’artistes contemporains dialoguent avec les bijoux, au fil des différents thèmes abordés par l’exposition. Ces œuvres de Leonor Antunes, Mike Kelley, Jean-Marie Appriou ou encore Liz Craft font écho à ces problématiques et ouvrent la question du bijou à celle du rapport au corps et au monde.