Matthew Chambers
Artiste basé à Los Angeles, Matthew Chambers présente une série de neuf peintures assemblées à partir d’une cinquantaine de tableaux découpés en lanières qui ont tous été créés au cours de l’année 2014.
Matthew Chambers explique ici la genèse de cette nouvelle série de peintures découpées:
«J’ai commencé ce travail en 2008 en utilisant des peintures que je jugeais impossibles à terminer. Ma pratique a toujours été centrée sur le médium pictural que j’essaie d’appréhender dans mon atelier. En travaillant sept jours par semaine (six désormais), je me suis retrouvé avec beaucoup de toiles non abouties, couvertes d’une couche de peinture tellement épaisse qu’elle semblait être sur le point de tomber. Découper et organiser les bandes qui allaient constituer ces nouvelles œuvres m’a permis d’une part de continuer le travail amorcé pour conserver ces images qui entrent ainsi dans un mouvement perpétuel, et d’autre part d’atteindre une pratique sans pertes.
Ce mouvement, que l’on ressent également dans mes dessins et gravures, aide sans doute à rendre toutes les images et les idées qu’elles contiennent plus égales les unes par rapport aux autres. Aucune peinture n’est meilleure qu’une autre, elles sont d’ailleurs toutes de taille identique. Ma conscience du poids de l’histoire de la peinture sur un jeune artiste s’aiguisant d’année en année, ce qui m’importe le plus est d’atteindre un détachement maximal et la plus grande objectivité possible.»
Pour Matthew Chambers, alors que l’acte de peindre et l’importance de ce médium restent pour lui inchangés, 2014 a marqué un changement en ce qui concerne cette série de peintures découpées. Il a commencé à employer des moyens lui permettant d’éviter la destruction de peintures en raison d’éventuelles complications dues au matériel, à l’orientation, etc. Il s’est demandé comment ralentir son processus à une époque où tout s’accélère, où ses peintures deviennent des images constamment en concurrence avec le flux continu d’images qui nous entourent. Il a donc décidé de consacrer l’année entière à travailler ses peintures à l’huile, se libérant au maximum des notions de temps et de délais à respecter, et permettant ainsi à l’acte de création, au travail fourni pendant ce temps, de devenir art. Ni la pièce finie, ni sa réception ne lui importent, ce sont plutôt les jours et les heures qu’il passe à créer ces Å“uvres qui sont importants pour lui.
Et à Matthew Chambers de poursuivre sa réflexion: «J’ai voulu défaire l’objet de son ego pour ainsi lui permettre de ne plus vaciller entre réussi et raté, bon ou mauvais, des catégories qui vont de pair avec la tentation de la perfection. Avec ceci à l’esprit, je n’ai jamais eu à me demander si ce que je réalisais était de l’art ou ce que mon travail pouvait apporter, parce qu’il n’y avait pas d’obligation de résultat. La question que ma création pose est de savoir comment chaque moment a été vécu. Avais-je fait mon travail? Quelles décisions avaient été les miennes? Ces décisions étaient-elles constructives ou non? Ces mêmes questions se sont posées à nouveau lorsque les bandes ont été recontextualisées et positionnées afin de former les collages constituant ces neuf œuvres.
Du travail de cette année 2014 résultent les travaux choisis pour l’exposition, et ces travaux posent la question du sens de l’existence de l’artiste, du fait de décider de produire de l’art et de ce que cela peut provoquer chez le spectateur. Le contenu de ces œuvres n’est plus considéré comme un possible raté mais devient arbitraire et métaphorique. Chacune des évocations visuelles en cache dix autres, le spectateur est submergé par les fragments d’images et est invité à faire ses propres choix.»