Karina Bisch et Vier5
Mathematicus Groteske
Le Frac Aquitaine ouvre l’année 2008 avec Karina Bisch et le collectif Vier5, deux graphistes de nationalité allemande pour une exposition qui confronte leurs univers. «Parions qu’il pourrait y avoir des sculptures géométriques, colorées et grossières, une petite fille à roulettes, des réminiscences d’un modernisme tropicalisé et monstrueux, de folles accumulations d’images, quelques ponctuations spatiales fluorescentes, une loupiote indiquant le chemin vers des avants-gardes perdues, des vitraux fragmentés et opaques, une jeune femme avalant goulûment du parfum, des costumes, des bijoux, des ladies & gentlemen variablement en formes, du lettrisme abstrait nécessitant l’usage d’une scie manuelle, des K, des B, des 4 et des 5. »
La pratique multiple de Karina Bisch pourrait être lue comme la traduction continue d’un inventaire iconographique personnel et fragmentaire, mêlant détails de constructions modernes et motifs ornementaux byzantins, icônes de l’abstraction picturale et jouets du Bauhaus, signes des industries culturelles et architecture du divertissement. Refusant toute joliesse, n’ayant peur ni du trash, ni d’une certaine élégance, l’artiste, entre utopie et décor, dogmatisme et usages intimes, romantisme révolutionnaire et dandysme pop, n’hésite pas à insérer des séries aux formes moins identifiées: démonstration d’un possible, appropriations d’une histoire inachevée.
Yann Chateigné, « Malerei, 36 Positien », in Bdap n°18, été 2005.
L’économie des moyens n’entre pas dans les préoccupations des Vier5.
Les signatures ironiquement surdimensionnées affirment une posture à rebours de l’image du designer effacé. Vier5 défend sa liberté, le luxe de créer trois posters pour une exposition, la fantaisie d’imprimer une image invisible, de concevoir des polices de caractères qui ne ressemblent à rien, le plaisir de se laisser surprendre. Ce qui n’exclut ni l’exigence professionnelle, ni la prise en compte des besoins du public. En ces temps difficiles, il se pourrait que l’utilité passe par la futilité.
Catherine de Smet, « Graphisme d’inutilité ludique (pourquoi j’aime le travail de Vier5) », in Marie Louise # 3, novembre 2006.