Présentation
Catherine Grenier
Martial Raysse. Rétrospective 1960-2014
Rassemblant plus de 200 œuvres — peintures, sculptures, films, photographies et dessins —, l’exposition propose pour la première fois au public une généreuse traversée de cinquante ans de création. Des années soixante à aujourd’hui, elle rassemble les œuvres emblématiques de chacune des périodes qui rythment le parcours de Martial Raysse.
Durant sa période Pop, puis avec les tableaux «à géométrie variable», l’artiste innove en introduisant dans sa peinture des objets de consommation courante et revisite avec insolence et virtuosité les archétypes féminins popularisés par la publicité comme par les maîtres de la peinture classique. L’exposition présente également les expérimentations des «années chamaniques» qui s’engagent au tournant des années 1970 des assemblages et des peintures inspirées par les pratiques artistiques collectives et les rituels magiques.
Parvenu au faîte de sa popularité, Martial Raysse opère durant ces années un renouvellement radical de sa pratique. Il se place alors résolument en rupture et en retrait du monde de l’art et des courants dominants, notamment à travers la production de films expérimentaux, au caractère satirique et imprégnés de culture psychédélique.
La rétrospective montre ensuite l’ambitieuse production picturale engagée à la fin des années 1970 qui convoque l’héritage des plus grands maîtres du passé et se caractérise par l’invention d’une imagerie et mythologie personnelles, ancrées dans l’observation du quotidien. Les thèmes bucoliques inspirés par son environnement — Martial Raysse vit retiré à la campagne — croisent de nombreuses références mythologiques et littéraires.
Enfin, aux côtés de sculptures et de films récents, l’exposition présente l’ensemble des tableaux de très grands formats produits depuis les années 1990, «fresques» animées proposant des visions allégoriques de l’humanité au caractère souvent carnavalesque.
«Si les lectures érudites et le contact avec les maîtres spirituels accompagnent l’évolution de Raysse, la fréquentation assidue des musées et une réflexion profonde sur l’histoire de la peinture sont les agents les plus déterminants de son changement. «Spelunca était comme un statement: je suis un peintre français, dans la tradition de la peinture. Et c’est dans cette tradition-là que je serai nouveau.» L’artiste insiste beaucoup sur le caractère novateur, d’avant-garde, de ce qu’il ne vit pas comme un «retour» à la peinture, mais une avancée «vers» la peinture. «Raphaël n’est pas derrière moi, il est loin devant moi, il est très en avance.»
Dans les musées européens qu’il visite, il cherche un enseignement, mais aussi un «déclic». Ce sera la compréhension d’un temps long. A l’observation des styles épisodiques du passé — le maniérisme, la vogue éphémère des vanités — il prend conscience de la relativité de la conviction propre à chaque génération d’avoir trouvé le style ou atteint la phase d’évolution qui allait s’imposer durablement. Il souscrit alors à une conception qui rappelle le modèle morphologique de Goethe, dont Salvador Dalà avant lui s’était fait l’adepte.
Dans cette pensée de l’évolution inspirée au poète par son étude de la nature, toutes les formes différentes et successives ne sont que les dérivations d’une forme archétypale unique et invariante, un «prototype» parfaitement cohérent et toujours intelligible. Raysse va donc se mettre à l’école des maîtres, sans privilégier une période ou un style.»
Catherine Grenier
Sommaire
— Avant-propos, par Alain Seban
— Préface de Bernard Blistène
Essais
— Martial Raysse ou le Dernier peintre, par Catherine Grenier
— Martial Raysse dessinateur, par Françoise Viatte
— Retour vers le futur: les années 2000 de «Monsieur Raysse», par Dimitri Salmon
— Les films de Martial Raysse: l’intimité du cinéma, par Anaël Pigeat
— Martial Raysse, «l’ymagier», par Cécile Debray
— Poésie, Martial Raysse
Œuvres
Chronologie, par Mica Gherghescu
— Bibliographie
— Liste des œuvres